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ensemble ; quand cette personne se fera connaître, mon rôle dans cette affaire cessera ; quand cette personne se fera connaître, il ne sera pas nécessaire que j’en sache davantage. Voilà tout ce que j’ai à dire. »

Nous nous regardâmes l’un l’autre ; puis je détournai les yeux, et les portai sur le plancher, en réfléchissant. De ces dernières paroles, je tirai la conclusion que miss Havisham, avec ou sans raison, ne l’avait pas mis dans sa confidence au sujet de ses projets sur Estelle ; qu’il en éprouvait quelque ressentiment et même de la jalousie, ou que réellement il s’opposait à ces projets, et ne voulait pas s’en occuper. Quand je relevai les yeux, je vis qu’il n’avait cessé tout le temps de me regarder malicieusement, et qu’il le faisait encore.

« Si c’est là tout ce que vous avez à me dire, monsieur, remarquai-je, il ne me reste plus rien à ajouter. »

Il fit un signe d’assentiment, tira sa montre tant redoutée des voleurs, et me demanda où j’allais dîner. Je lui répondis :

« Chez moi avec Herbert. »

Et, comme conséquence naturelle, je lui demandai s’il voudrait bien nous honorer de sa compagnie. Il accepta aussitôt l’invitation, mais il insista pour partir sur-le-champ avec moi, afin que je ne fisse pas d’extra pour lui. Il avait d’abord une ou deux lettres à écrire et, bien entendu, ses mains à laver.

« Alors, dis-je, je vais aller dans le cabinet à côté, causer avec Wemmick. »

Le fait est que, lorsque les cinq cents livres étaient tombées dans ma poche, une pensée m’était venue à l’esprit ; elle s’y était déjà présentée souvent, et il me semblait que Wemmick était une excellente personne à consulter sur une pensée de cette sorte.

Il avait déjà fermé sa caisse, et faisait ses préparatifs