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Je continuai à marcher à côté de Biddy, qui tenait toujours les yeux fixés à terre.

« Je ne connais pas les détails de la mort de ma sœur, Biddy.

— Il y a peu de chose à en dire. La pauvre créature ! Elle était dans un de ses accès, bien qu’ils fussent plutôt moindres que plus forts dans ces derniers temps. Il y a quatre jours, dans la soirée, elle sortit de son apathie ordinaire, juste au moment du thé, et dit très-distinctement : « Joe ! » Comme elle n’avait pas dit un seul mot depuis longtemps, je courus chercher M. Gargery dans la forge. Elle me faisait signe qu’elle désirait le voir assis à côté d’elle, et voulait que je misse ses bras autour de son cou. C’est ce que je fis, et elle appuya sa main sur son épaule, toute contente et toute satisfaite, et bientôt après, elle dit encore une fois : « Joe », et puis une fois : « Pardon », et une fois : « Pip. » Et elle ne releva plus jamais sa tête, et ce fut juste une heure après que nous l’étendîmes sur son lit, parce que nous vîmes qu’elle était morte. »

Biddy pleura… Le sombre jardin, et la rue, et les étoiles qui se montraient, tout cela était trouble à mes yeux.

— On n’a jamais rien découvert, Biddy ?

— Rien.

— Sais-tu ce qu’Orlick est devenu ?

— À la couleur de ses habits, je dois penser qu’il travaille dans les carrières.

— Tu l’as donc revu ? Pourquoi regardes-tu maintenant cet arbre sombre dans la rue ?

— C’est là que j’ai vu Orlick le soir de la mort de votre sœur.

— Et tu l’as encore revu depuis, Biddy ?

— Oui, je l’ai vu là depuis que nous nous prome-