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CHAPITRE IV.


Dans ses fourrures de voyage, Estelle semblait plus délicatement belle qu’elle n’avait encore paru, même à mes yeux. Ses manières aussi étaient plus séduisantes qu’elle ne leur avait permis d’être jusqu’alors vis-à-vis de moi, et je crus voir dans ce changement l’influence de miss Havisham.

Nous étions dans la cour de l’hôtel : elle m’indiquait ses bagages. Quand nous les eûmes tous assemblés, je me souvins, n’ayant pensé qu’à elle pendant tout le temps, que je ne savais pas où elle allait.

« Je vais à Richmond, me dit-elle. Nous avons appris qu’il y a deux Richmond : l’un dans le comté de Surrey, l’autre dans le comté d’York. Le mien est le Richmond de Surrey. C’est à dix milles d’ici. Je dois prendre une voiture et vous devez me conduire. Voici ma bourse, et vous devez y puiser pour toutes mes dépenses. Oh ! il faut la prendre ! Nous n’avons le choix ni vous ni moi, il faut obéir à nos instructions. Ni vous ni moi ne sommes libres de suivre notre propre impulsion. »

À son regard en me donnant la bourse, j’espérai qu’il y avait dans ses paroles une intention plus intime.