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« Jeune homme, dit Pumblechook en me jetant sa tête en avant comme autrefois, vous allez chez Joseph… Que m’importe, me demandez-vous, où vous allez ? Je vous dis, monsieur, que vous allez chez Joseph. »

Le garçon toussa comme pour m’inviter modestement à passer là-dessus.

« Maintenant, dit Pumblechook, et tout cela avec l’air exaspéré d’un homme qui aurait défendu la cause de la vertu, et qui était parfaitement convaincant et concluant, je vous dirai ce qu’il faut dire à Joseph. Voici présent le propriétaire du Cochon bleu, qui est connu et respecté dans cette ville, et voici William, dont le nom de famille est Potkins, si je ne me trompe.

— Vous ne vous trompez pas, monsieur, dit William.

— En leur présence, continua Pumblechook, je vais vous dire, jeune homme, ce que vous direz à Joseph. Vous direz : « Joseph, j’ai vu aujourd’hui mon premier bienfaiteur et le fondateur de ma fortune ; je ne dirai pas ses noms, Joseph, c’est inutile ; mais c’est ainsi qu’on veut bien l’appeler dans la ville, et j’ai vu cet homme. »

— Je jure que je ne le vois pas ici, dis-je.

— Dites cela encore ! repartit Pumblechook. Dites que vous avez dit cela, et Joseph lui-même trahira probablement sa surprise.

— Ici, vous vous méprenez sur son compte, dis-je ; je le connais mieux que vous.

— Dites, continua Pumblechook, Joseph, j’ai vu cet homme ; et cet homme ne vous veut pas de mal et ne me veut pas de mal. Il connaît votre caractère, et il sait combien vous êtes brute et ignorant, il connaît mon caractère, et il connaît mon ingratitude. Oui, Joseph,