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L’exactitude de ces rapports était suffisamment évidente pour me donner une grande confiance dans les informations de Joe.

« Et maintenant, dit Joe, vous n’êtes pas encore assez fort, mon vieux camarade, pour ramasser plus d’une pelletée additionnelle de nouvelles aujourd’hui. Le vieil Orlick s’est introduit avec effraction dans une maison habitée.

— Chez qui ? dis-je.

— Non… mais je vous avoue que ses manières sont devenues très-bruyantes, dit Joe en forme d’excuses. Cependant la maison d’un Anglais est son château, et les châteaux ne doivent pas être forcés, excepté en temps de guerre ; et quels qu’aient été ses défauts, il était bon marchand de blé et de graines.

— C’est donc la maison de Pumblechook qui a été forcée ?

— C’est elle, Pip, dit Joe, et on a pris son tiroir, et on a pris sa caisse, et on a bu son vin, et on a mangé ses provisions, et on l’a souffleté, et on lui a tiré le nez, et on l’a attaché à son bois de lit, et on lui a donné une douzaine de coups de poing, et on lui a rempli la bouche de graines pour l’empêcher de crier ; mais il a reconnu Orlick, et Orlick est dans la prison du comté. »

Peu à peu nous pûmes causer sans restriction. Je recouvrais mes forces lentement, mais je les recouvrais, et Joe restait avec moi, et il me semblait que j’étais encore le petit Pip.

Car la tendresse de Joe était si admirablement proportionnée à mes besoins, que j’étais comme un enfant entre ses mains. Il lui arrivait de s’asseoir près de moi, et de me parler avec son ancienne confiance, son ancienne simplicité, et son ancienne protection paternelle, de sorte que j’étais tenté de croire que toute ma vie,