Page:Dickens - Les Grandes Espérances, Hachette, 1896, tome 2.djvu/32

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

m’apportât l’un ou l’autre, car alors ce fut pire que jamais. Je commençai par rôder autour du bureau des voitures, bien avant que la voiture eût seulement quitté le Cochon bleu de notre ville. Je le savais parfaitement, et pourtant il me semblait qu’il n’y avait pas de sécurité à quitter de vue le bureau pendant plus de cinq minutes de suite. J’avais déjà passé la première demi-heure d’une garde de quatre ou cinq heures dans cet état d’excitation, quand M. Wemmick se heurta contre moi.

« Holà ! eh ! monsieur Pip ! dit-il, comment ça va-t-il ? Je ne pensais pas que ce fût ici que vous dussiez faire votre faction. »

Je lui expliquai que je venais attendre quelqu’un qui devait arriver par la voiture, et je lui demandai des nouvelles de son père et du château.

« Tous les deux sont florissants. Merci ! dit-il, le vieux surtout, c’est un fameux père, il aura quatre-vingt-deux ans à son prochain anniversaire ; j’ai envie de tirer quatre-vingt-deux coups de canon, si toutefois les voisins ne se plaignent pas, et si mon canon peut supporter un pareil service. Mais on ne parle pas de cela à Londres. Où pensez-vous que j’aille ?

— À l’étude, dis-je, car il était tourné dans cette direction.

— Tout près, répondit Wemmick, car je vais à Newgate. Nous sommes en ce moment dans l’affaire d’un banquier qui a été volé. Je suis allé jusque sur la route, pour avoir une idée de la scène où l’action s’est passée, et là-dessus je dois avoir un mot ou deux d’entretien avec notre client.

— Est-ce que votre client a commis le vol ? demandai-je.

— Que Dieu ait pitié de votre âme et de votre corps,