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« La nuit est si mauvaise, monsieur, dit le portier en me rendant le verre, qu’il est venu peu de monde à ma porte ; en outre des trois individus dont je vous ai parlé je ne me souviens pas qu’il soit entré personne depuis environ onze heures ; un étranger vous a demandé à cette heure-là.

— Oui, mon oncle, murmurai-je.

— Vous l’avez vu, monsieur ?

— Oui !… oh ! oui…

— Ainsi que la personne qui était avec lui ?

— La personne qui était avec lui ? répétai-je.

— J’ai jugé que la personne était avec lui, repartit le portier, car elle s’est arrêtée en même temps que lui quand il m’a parlé, et l’a suivi lorsqu’il a continué son chemin.

— Quel genre d’homme était-ce ? »

Le portier ne l’avait pas particulièrement remarqué ; il pensait que c’était un ouvrier, autant qu’il pouvait se le rappeler : il avait une sorte de vêtement couleur poussière et par-dessus un habit noir. Le portier faisait moins d’attention à cette circonstance que je n’en faisais moi-même, et cela tout naturellement, car il n’avait pas les mêmes raisons que moi pour y attacher de l’importance.

Quand je me fus débarrassé de lui, ce que je crus bon de faire sans prolonger davantage ces explications, j’eus l’esprit fort troublé par ces deux circonstances coïncidant ensemble, bien qu’on pût leur donner séparément une innocente solution : l’inconnu de l’escalier pouvait être quelque dîneur en ville attardé, qui s’était trompé de maison et qui pouvait être monté jusque sur mon escalier et là s’être assoupi ; peut-être aussi mon visiteur sans nom avait-il amené quelqu’un avec lui pour lui montrer le chemin. Cependant tout cela