Page:Dickens - Les Grandes Espérances, Hachette, 1896, tome 1.djvu/328

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Vous pensez ! repartit Drummle. Ah ! Seigneur !

— J’ose dire, continuai-je avec l’intention d’être très-mordant, que vous ne prêteriez d’argent à aucun de nous, si nous en avions besoin.

— Vous dites vrai, répondit Drummle ; je ne vous prêterais pas une pièce de six pence. D’ailleurs, je ne la prêterais à personne.

— Vous préfèreriez la demander dans les mêmes circonstances, je crois ?

— Vous croyez ? répliqua Drummle. Ah ! Seigneur ! »

Cela devenait d’autant plus maladroit, qu’il était évident que je n’obtiendrais rien de sa stupidité sordide. Je dis donc, sans avoir égard aux efforts d’Herbert pour me retenir :

« Allons, M. Drummle, puisque nous sommes sur ce sujet, je vais vous dire ce qui s’est passé, entre Herbert que voici et moi, quand vous lui avez emprunté de l’argent.

— Je n’ai pas besoin de savoir ce qui s’est passé entre Herbert que voici et vous, grommela Drummle, et je pense, ajouta-t-il en grommelant plus bas, que nous pourrions aller tous deux au diable pour en finir.

— Je vous le dirai cependant, fis-je, que vous ayez ou non besoin de le savoir. Nous avons dit qu’en le mettant dans votre poche, bien content de l’avoir, vous paraissiez vous amuser beaucoup de ce qu’il avait été assez faible pour vous le prêter. »

Drummle éclata de rire ; et il nous riait à la face, avec ses mains dans ses poches et ses épaules rondes jetées en arrière : ce qui voulait dire que c’était parfaitement vrai, et qu’il nous tenait tous pour des ânes.