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s’habillait pour la cérémonie… à neuf heures moins vingt minutes…

— À cette heure et à ces minutes, dit Herbert en faisant un signe de tête affirmatif, heures et minutes auxquelles elle arrêta ensuite toutes les pendules. Ce qui, au fond de tout cela, fit manquer le mariage, je ne vous le dirai pas parce que je ne le sais pas… Quand elle se releva d’une forte maladie qu’elle fit, elle laissa tomber toute la maison dans l’état de délabrement où vous l’avez vue et elle n’a jamais regardé depuis la lumière du soleil.

— Est-ce là toute l’histoire ? demandai-je après quelque réflexion.

— C’est tout ce que j’en sais, et encore je n’en sais autant que parce que j’ai rassemblé moi-même tous ces détails, car mon père évite toujours d’en parler, et même lorsque miss Havisham m’invita à aller chez elle, il ne me dit que ce qui était absolument nécessaire pour moi de savoir. Mais il y a une chose que j’ai oubliée : on a supposé que l’homme dans lequel elle avait si mal placé sa confiance a agi, dans toute cette affaire, de connivence avec son frère ; que c’était une intrigue ourdie entre eux et dont ils devaient se partager les bénéfices.

— Je suis surpris alors qu’il ne l’ait pas épousée pour s’emparer de toute la fortune, dis-je.

— Peut-être était-il déjà marié, et cette cruelle mystification peut avoir fait partie du plan de son frère, dit Herbert ; mais faites attention que je n’en suis pas sûr du tout.

— Que sont devenus ces deux hommes ? demandai-je après avoir réfléchi un instant.

— Ils sont tombés dans une dégradation et une honte plus profonde encore si c’est possible ; puis la ruine est venue.