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— Oh ! d’une manière parfaite. Seulement elle n’a pas dansé avec moi. Je n’aurais pas voulu danser avec vous, Edwin, vous le savez bien. Ainsi vous comprenez… »

Edwin, qui ne trouve pas une grande clarté dans ce raisonnement, s’informe s’il a la liberté de demander pourquoi l’on n’aurait pas voulu danser avec lui.

« Parce que j’étais si lasse de vous la dernière fois que nous nous sommes vus… »

Cependant elle se hâta d’ajouter en voyant la figure d’Edwin s’assombrir :

« Cher Edwin, vous étiez tout aussi las de moi.

— Ai-je jamais rien dit de semblable, Rosa ?

— Vous ? oh ! non… seulement vous l’avez laissé voir. Oh ! comme elle a bien rendu cela ! s’écria Rosa avec un soudain enthousiasme pour le talent de la pensionnaire qui avait joué le rôle d’Edwin.

— Ce qui me frappe en ceci, c’est que cette jeune fille est une petite impudente, dit Edwin Drood. Pussy, c’est le dernier anniversaire de votre naissance que vous aurez passé dans cette vieille maison.

— Ah ! oui. »

Rosa joignit les mains, baissa les yeux, soupira, et secoua la tête.

« Je regrette cette pauvre vieille maison… Je sais combien elle me manquera quand je serai partie, et si loin… et si jeune…

— Peut-être ferions-nous mieux de nous arrêter tout court en chemin, Rosa ? »

Elle releva le front, lui jeta un seul regard, puis de nouveau secoua la tête, soupira et baissa les yeux.

« Cela veut dire, n’est-ce pas, Pussy, que nous sommes tous deux résignés à notre sort ? »

Elle fit de la tête un signe d’assentiment, et, après un court moment de silence :

« Nous savons que nous devons être mariés, dit-elle, et mariés quand je sortirai d’ici ; sans cela les pauvres filles seraient si affreusement désappointées !… »

En ce moment on aurait pu lire plus de compassion pour elle et pour lui-même que d’amour sur le visage du fiancé.