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« Pauvre… pauvre Eddy !… » pensait Rosa en ce moment.

M. Tartar gesticulait de la main droite, se penchait vers sa belle compagne, et lui parlait d’un ton animé.

« Il n’était ni si fort, ni si brûlé par le soleil, quand il sauva M. Crisparkle, pensa Rosa, en lui lançant un regard, mais il était déjà courageux et déterminé. »

M. Tartar lui apprit qu’il avait été marin et qu’il avait navigué par tout le monde pendant des années et des années…

« Quand comptez-vous reprendre la mer ? lui demanda Rosa.

— Jamais ! »

Rosa se demandait ce que penseraient les jeunes filles de la pension, si elles la voyaient traverser la rue au bras d’un marin.

Elle était assez émue et trouvait les passants bien petits et bien faibles, en les comparant à l’homme vigoureux qui aurait pu l’enlever dans ses bras et la porter pendant des milles et la tirer de n’importe quel danger…

Elle pensait encore que les yeux bleus de M. Tartar, dont la vue portait si loin, semblaient précisément habitués à surveiller le danger, et qu’il était homme à courir au-devant pour l’affronter de plus en plus près.

Il lui arriva de le regarder furtivement, et elle se dit que lui aussi devait penser quelque chose de ses yeux.

Ce qui la rendit un peu confuse.

Aussi ne sut-elle jamais parfaitement bien comment elle était montée, avec l’aide de M. Tartar, jusqu’à son jardin aérien et comment elle crut alors se trouver dans un pays merveilleux où les fleurs s’épanouissaient soudain, comme en pleine campagne à l’extrémité de leurs tiges de fer.

Puissent ces fleurs s’épanouir toujours !