Les sourcils de Rosa reprirent leur expression de perplexité interrogative.
« Si peu à sa place, continua M. Grewgious, que je me sens constamment disposé à m’excuser envers lui, et il est d’avis, quoiqu’il ne le dise pas, que cela est juste, très-juste. »
M. Grewgious, en ce moment, était devenu si ténébreux et si énigmatique que Rosa ne savait plus que penser.
Pendant qu’elle réfléchissait et cherchait à comprendre, M. Grewgious s’écria tout à coup pour la seconde fois :
« Causons. Nous parlions de M. Bazzard. C’est un secret, et, de plus, c’est le secret de M. Bazzard. Mais la seule présence de celle qui est assise à ma table me rend si exceptionnellement expansif que je me sens entraîné à lui faire part de ce secret sous le sceau d’une inviolable discrétion. Que pensez-vous qu’ait fait M. Bazzard ?
— Oh ! cher monsieur, s’écria Rosa en rapprochant sa chaise de celle de son tuteur, car sa pensée venait d’être ramenée sur Jasper, rien de criminel, je suppose ?
— Il a écrit une pièce de théâtre, dit M. Grewgious à voix basse et d’un ton solennel, une tragédie, »
Rosa sembla soulagée.
« Et personne, poursuivit M. Grewgious du même ton, n’a voulu l’entendre, ou la faire représenter. »
Rosa semblait pensive et secouait lentement la tête, comme pour dire :
« Il se passe de pareilles choses en ce monde !… Il y a des clercs qui écrivent des tragédies !…
— Maintenant, vous le savez, dit M. Grewgious, je ne serais pas capable, moi, de composer une pièce de théâtre.
— Pas même une mauvaise, monsieur ? demanda ingénûment Rosa.
— Je ne le crois pas. Si j’étais sous le coup d’une sentence de mort, au moment d’être décapité, et qu’un exprès arrivât avec la grâce du condamné Grewgious à la condition qu’il écrirait une pièce de théâtre, je pense que je préférerais redemander le billot et prier l’exécuteur d’en finir. »
M. Grewgious se passa la main sous le menton ; il était assez ému.