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« J’irai rendre visite à Mme Tope après mon dîner, » dit M. Datchery.

En effet, quand il eut pris son repas, il se fit renseigner sur la route qu’il devait suivre et se mit en marche.

Mais la position de l’hôtel étant fort retirée, et les indications du garçon ayant été moins que précises, il se trouva bientôt fort embarrassé, allant de ci et de là dans les environs de la tour de la cathédrale d’où la demeure de Mme Tope ne pouvait être éloignée.

Il semblait jouer au jeu favori des enfants : il brûlait quand il voyait la tour et gelait quand il ne pouvait plus l’apercevoir.

M. Datchery devenait de plus en plus froid, quand il arriva en vue d’un coin du cimetière abandonné où broutait un malheureux mouton.

Nous disons malheureux, parce qu’un hideux jeune garçon qui le lapidait à travers la clôture, l’avait déjà rendu boiteux d’une jambe, et semblait animé de la bienveillante intention de poursuivre ses exploits, en brisant les trois autres pattes de la pauvre bête.

« Touché encore ! s’écriait l’enfant quand, l’animal sautait. Ma pierre a fait une marque dans la laine.

— Laisse cette bête tranquille ! dit M. Datchery. Ne vois-tu pas que tu l’as déjà rendu boiteuse ?

— C’est pas vrai ! réplique l’enfant. C’est lui-même qui s’est blessé, je l’ai vu, et c’est un avertissement que je lui donne pour qu’il n’abîme pas davantage le mouton de son maître.

— Viens ici,

— Je ne veux pas… Je viendrai si vous m’attrapez.

— Reste où tu es alors et montre-moi où est la demeure de Mme Tope.

— Comment puis-je rester où je suis et vous montrer la demeure des Tope, quand leur maison est de l’autre côté de la cathédrale, et qu’il faut pour y arriver faire quantité de tours et de détours ? Imbécile ! Ah ! ah ! ah !

— Montre-moi le chemin et je te donnerai quelque chose.

— Venez alors ! »

Ce petit dialogue terminé, l’enfant se mit en marche et,