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« Les commandements disent aussi : « Tu ne porteras pas de faux témoignage… »

Assez ! tonna M. Honeythunder, avec une solennité et une sévérité qui auraient fait crouler la salle dans une réunion publique, as… sez !… Mes pupilles étant maintenant majeurs, je me trouve dégagé de fonctions que je ne pouvais plus contempler sans frissonner d’horreur. Voici les comptes que vous vous êtes chargé d’accepter dans leur intérêt ; voici l’état de la balance en leur faveur que vous vous êtes chargé de recevoir et que vous ne sauriez recevoir trop tôt. Maintenant, permettez-moi de vous le dire, monsieur, comme homme et comme Chanoine, je désirerais que vous eussiez accepté une autre mission. »

Ces paroles furent accompagnées d’un fier mouvement de tête.

« Une autre mission… » répéta-t-il.

Second mouvement de tête.

« Une autre mission !… »

Troisième mouvement plus fier que les autres.

M. Crisparkle se leva, le visage un peu animé, mais parfaitement maître de lui.

« M. Honeythunder, dit-il en prenant les papiers auxquels il avait été fait allusion, que je puisse accepter une autre mission que celle que je remplis en ce moment, c’est une affaire de goût, et d’appréciation. Peut-être trouveriez-vous ma conduite plus conforme à vos principes si je m’enrôlais parmi les membres de votre société ?

— Certes, monsieur, répliqua M. Honeythunder en recommençant à secouer la tête d’un air menaçant, il aurait mieux valu pour vous avoir fait depuis longtemps ce que vous dites !

— Ce n’est pas mon opinion.

— Et, dit M. Honeythunder, je trouverais digne d’un homme de votre profession la résolution de se dévouer à la découverte et à la punition du coupable, au lieu que vous laissez ce soin à un laïque.

— Je ne puis envisager ma profession sous ce point de vue, dit M. Crisparkle ; elle m’enseigne que le premier de mes devoirs est de se dévouer à ceux qui sont dans la détresse ou dans la peine, qui sont malheureux ou oppri-