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semblable, les philanthropes sont remarquablement favorisés.

M. Crisparkle en voyait des exemples sous ses yeux.

Il y avait là, entrant ou sortant, plusieurs professeurs, tous ayant un air terriblement agressif.

On aurait dit des gens prêts à se mesurer avec le premier novice qui leur tomberait sous la main.

On se serait cru dans une salle d’armes.

Ces estimables professeurs s’étudiaient évidemment au moulinet moral.

M. Crisparkle continua le cours de ses observations et de sa comparaison ; elle n’était pas à l’avantage des philanthropes.

Premièrement, ils étaient moins bien entraînés que les pugilistes ; ils avaient trop de chair, leur visage et leur corps présentaient une surabondance de ce que les pugilistes experts appellent suet pudding (boudin de graisse).

Secondement, les philanthropes n’avaient pas le bon caractère des pugilistes et ils étaient plus grossiers en paroles.

Troisièmement, leur code de combat avait grand besoin d’être révisé, les philanthropes se permettant ce que ne se permettraient jamais les pugilistes, par exemple, de frapper leur homme à terre et de trépigner sur lui sans merci.

Sous ce dernier rapport les professeurs du noble art du pugilat étaient de beaucoup plus nobles que les professeurs de philanthropie.

M. Crisparkle était tellement absorbé dans ses réflexions sur ces ressemblances et ces dissemblances, et par l’attention qu’il donnait à tous ceux qui passaient et repassaient devant lui, toujours en quête, à ce qu’il lui semblait, d’arracher quelque chose à quelqu’un, sans rien donner à personne, qu’on appela son nom sans qu’il l’entendît.

Quand il y eut enfin répondu, un philanthrope à gages, mal vêtu et mal payé, qui aurait certainement trouvé plus d’avantage à servir chez un ennemi déclaré de la race humaine, l’introduisit dans le cabinet de M. Honeythunder.