Page:Dickens - Le Mystère d'Edwin Drood, 1880.djvu/232

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

La chère vieille bergère en porcelaine de Saxe était mortellement tourmentée.

Elle craignait pour son fils, et l’on ne peut décrire l’état d’exaspération où la mettait l’idée d’avoir chez elle un pareil hôte.

D’ailleurs, l’autorité à laquelle le chanoine devait officiellement déférer, en cette circonstance, avait décidé la question.

« M. Crisparkle, lui dit le doyen, la justice humaine peut se tromper ; mais il faut agir d’après ses lumières. Le temps où l’on se réfugiait dans le sanctuaire est passé. Ce jeune homme ne peut pas jouir du droit d’asile chez nous.

— Vous voulez me faire comprendre qu’il doit quitter ma maison, monsieur ?

— M. Crisparkle, répliqua le prudent Doyen, je ne prétends exercer aucune autorité dans votre maison. Je confère simplement avec vous, sur la pénible nécessité où vous vous trouvez de priver ce jeune homme des grands avantages qu’il aurait tirés de vos conseils et de vos leçons.

— C’est vraiment lamentable, monsieur, murmura M. Crisparkle.

— Lamentable, répéta le Doyen.

— Mais s’il y a nécessité, balbutia M. Crisparkle.

— Malheureusement, vous le reconnaissez vous-même. »

M. Crisparkle baissa le front.

« Il est dur de préjuger la position de ce jeune homme, mais je comprends que…

— Précisément… parfaitement… comme vous le dites, monsieur Crisparkle, interrompit le Doyen en remuant doucement la tête. Il n’y a pas d’autre alternative. Votre bon sens vous l’a bien fait découvrir.

— Je suis entièrement convaincu de sa parfaite innocence, monsieur.

— Bon… bon…, dit le Doyen d’un ton plus confidentiel, tout en regardant autour de lui. Je ne voudrais pas être aussi affirmatif. Non, pas aussi affirmatif. Assez de soupçons pèsent sur lui. Non, je pense que je ne voudrais pas être aussi affirmatif.