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On racontait qu’il avait notoirement menacé le jeune homme disparu, et, d’après la déclaration même de son fidèle ami et précepteur, qui se donnait tant de mal pour lui, il avait une cause de vive animosité contre ce malheureux Edwin Drood.

Il s’était armé d’un outil meurtrier lors de la fatale soirée, et il était parti de grand matin après le meurtre accompli.

On avait trouvé sur lui des taches de sang, elles pouvaient avoir pour origine la cause qu’il avait indiquée, mais elles pouvaient aussi en avoir une autre.

La perquisition opérée dans sa chambre, en vertu du mandat délivré à cet effet, avait fait découvrir qu’il avait brûlé tous ses papiers, et mis en ordre tout ce qui lui appartenait dans l’après-midi du jour qui avait précédé le crime.

La montre trouvée à l’écluse avait été reconnue par le bijoutier comme étant celle qu’il avait montée et réglée pour M. Edwin Drood, à deux heures vingt minutes de la même après-midi.

Elle avait marché et l’opinion positive du bijoutier était qu’elle n’avait pas été remontée depuis.

Ceci justifiait une hypothèse assez en faveur, à savoir que cette montre avait été prise à Edwin peu de temps après qu’il avait quitté la maison de M. Jasper, à minuit, en compagnie de Neville, et qu’elle avait été jetée à l’endroit où on l’avait découverte, après avoir été gardée pendant quelques heures.

Pourquoi avait-elle été jetée là ?

Le jeune homme avait-il été assassiné et assez habilement défiguré ou caché pour que l’assassin pût espérer avoir rendu impossible la constatation de son identité.

Restaient cependant les objets qu’il portait sur lui.

L’assassin avait dû songer à faire disparaître ceux de ces objets les plus durables et les plus faciles à reconnaître, c’est-à-dire la montre et l’épingle.

Quant aux occasions qu’il pouvait avoir trouvées de les jeter dans la rivière, si les soupçons s’arrêtaient sur lui, elles étaient faciles à constater.

Plusieurs personnes l’avaient vu errer de ce côté de la ville, l’air sinistre et égaré.