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Il se dit à lui-même :

« Oui, il y a quelque chose… mais qu’est-ce ?… Auquel de mes sens s’adresse cet avertissement ? »

Aucun de ses sens ne lui donnait, en effet, une perception quelconque.

Il écouta, et son oreille ne perçut encore que la chute de l’eau tombant par-dessus l’écluse.

Il savait très-bien que le mystère dont son esprit était tout plein pouvait suffire à l’égarer.

Non, vraiment, ce point de la rive n’était pas un lieu hanté.

Il n’avait bien eu qu’une sorte d’hallucination.

Il voulut la dissiper et il fit appel à toute la puissance de sa vue perçante.

Il se rapprocha de l’écluse et fixa son regard sur les étais et les poutres.

Rien d’inaccoutumé ne lui apparut.

Cependant il prit la résolution de revenir le lendemain de grand matin.

L’écluse fut sa seule pensée toute la nuit, et il y était retourné dès le lever du soleil.

C’était par une belle matinée encore très-froide.

Il s’arrêta à l’endroit où il s’était arrêté la veille au soir.

Il discernait les plus minutieux détails de la chute d’eau.

Rien…

Il allait s’éloigner et il détournait déjà les yeux, quand ils furent attirés sur un point…

Toute la force de son regard encore une fois se concentra…

Ce qu’il voyait, c’était un objet brillant qui le fascinait, et il commença vivement à se dépouiller de ses vêtements.

Il plongea dans l’eau glacée et nagea vers ce point qui l’attirait.

Escaladant alors les poutres, il en retira une montre accrochée par sa chaîne, entre les interstices des pièces de charpente.

Cette montre portait gravées sur sa cuvette les lettres E. D.

Il rapporta la montre sur la berge, nagea de nouveau vers l’écluse, et l’escalada encore une fois.