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Ce fut à peine s’il prononça un mot jusqu’au moment où il prit congé d’elle, à la porte de la maison des Nonnes.

Elle n’entra pas immédiatement après son départ ; elle resta le regardant s’éloigner dans la rue.

Deux fois il dépassa la porte du cloître, comme s’il éprouvait de la répugnance à s’y engager.

À la fin, l’horloge de la cathédrale sonna un quart, Neville tourna rapidement sur lui-même et entra précipitamment.

Ainsi donc, il monte l’escalier de la poterne.

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Edwin Drood avait passé une journée solitaire.

Quelque chose d’un intérêt plus profond qu’il ne l’avait pensé s’était détaché de sa vie, et, dans le silence de sa chambre, il avait pleuré.

Quoique l’image de Mlle Landless voltigeât encore à l’arrière-plan dans son imagination, la jolie petite créature si affectueuse, qu’il avait trouvée plus ferme et plus sage qu’il ne l’aurait jamais supposé, occupait encore une grande place dans son cœur.

C’est avec un soupçon de sa propre indignité qu’il pensait à elle et à ce qu’ils auraient pu être l’un pour l’autre, s’il eût été plus sérieux, ces derniers temps, s’il l’avait estimée à une plus haute valeur, si au lieu d’accepter négligemment le lot qui lui était échu dans la vie, comme un héritage tout naturel, il s’était mieux étudié à la connaître et à l’apprécier.

Et pourtant, malgré tout cela, malgré le douloureux déchirement qu’il se sentait au cœur, la vanité, un caprice de jeune homme agitait toujours devant ses yeux la belle image de Mlle Landless.

C’était un étrange coup d’œil que celui que lui avait lancé Rosa au moment de leur séparation à la porte de la Maison des Nonnes.

Avait-elle voulu lui faire sentir qu’elle voyait au delà de la surface de ses pensées, qu’elle pénétrait dans les replis intimes de son être ?

Cela était difficile à admettre, car le regard avait été à la fois étonné et scrutateur.