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« Mesdemoiselles, la révolution d’une autre année nous a ramenées à cette époque de fête où les premiers sentiments de notre nature font bondir nos… »

Chaque année, Mlle Twinkleton était sur le point d’ajouter : « seins » ; mais tous les ans elle s’arrêtait au moment de prononcer un pareil mot, et elle y substituait celui de « cœurs. »

… Hum !… la révolution d’une nouvelle année nous a ramenées à une interruption dans nos études. Espérons que ces études ont été bonnes… Comme le marinier dans sa barque, le guerrier dans sa tente, le captif dans sa prison, et le voyageur dans ses pérégrinations lointaines, nous aspirons à revoir notre foyer. Répéterons-nous, en cette occasion, les beaux vers qui ouvrent la saisissante tragédie d’Addison :

NousL’aube blanchît à l’horizon,
NousLe matin, perçant d’épais nuages,
Nous apporte le grand, le mémorable jour.

Non, ce n’est pas cela !… De l’horizon au zénith tout est couleur de rose, car tout nous parle de nos parents et de nos amis. Puissions-nous les trouver dans un état prospère ; puissent-ils se convaincre que nous avons prospéré nous-mêmes au gré de leur attente ! Mesdemoiselles, il ne nous reste plus, avec tout l’amour que nous avons les unes pour les autres, qu’à nous dire adieu. Au bonheur de nous revoir… Et quand le moment sera venu de reprendre nos travaux… »

Ici, un sentiment général de mélancolie se manifeste à la ronde.

« … Ces travaux qui… ces travaux que… rappelons-nous toujours ce qui a été dit par ce général spartiate, dans des termes trop connus pour être répétés, à cette bataille, qu’il est inutile de désigner… »

Mademoiselle Twinkleton était à bout.

Les servantes de l’établissement, ornées de leurs plus beaux bonnets, firent circuler les plateaux.

Les jeunes filles sirotent et grignotent et les voitures commencent à heurter les pavés de la rue.