Page:Dickens - Le Mystère d'Edwin Drood, 1880.djvu/138

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Elle prit la main qu’il lui tendait, et dans un mouvement de reconnaissance, presque de vénération, elle la porta à ses lèvres.

« Fi ! fi ! dit le chanoine, je suis trop payé. »

Et il s’éloigna.

Tout en revenant vers l’enclos de la cathédrale et en marchant dans l’obscurité, le chanoine rêvait au meilleur moyen de réaliser la promesse qu’il avait faite.

« On me demandera probablement de marier Edwin et Mlle Bud, se disait-il, et je voudrais qu’ils fussent déjà mariés et partis. Mais occupons-nous d’abord du plus pressé. »

Il débattit en lui-même, s’il écrirait au jeune Drood, ou s’il parlerait à Jasper.

La conscience qu’il avait d’être aimé de tout le personnel de la cathédrale, le fit incliner vers ce dernier parti et la vue de la maison de Jasper où il vit de la lumière le détermina.

« Je frapperai le fer pendant qu’il est chaud, dit-il. »

Jasper était endormi sur un canapé devant le feu.

Ayant monté l’escalier de la poterne, et donné contre la porte un coup léger sans recevoir de réponse, M. Crisparkle tourna doucement le bouton et entra.

Longtemps après il devait être frappé par le souvenir de l’état dans lequel il trouva Jasper : une sorte d’alternative délirante entre le sommeil et la veille.

Jasper bondit en s’écriant :

« Qu’y a-t-il ?… Qui est entré ?…

« Ce n’est que moi, Jasper. Je regrette d’avoir troublé votre repos. »

Le feu qui brillait dans le regard du chantre s’éteignit dès qu’il eut reconnu le visiteur, et il dérangea une chaise ou deux pour lui permettre de s’approcher du feu.

« Je rêvais et je suis heureux d’être arraché à un sommeil qui ne peut que troubler la digestion après le dîner, balbutia-t-il, sans compter que vous êtes toujours le bienvenu chez moi ?

— Merci. Je ne suis pas bien sûr, répondit M. Crisparkle quand il eut pris place dans un fauteuil auprès du feu, que le sujet qui m’amène doive être ici aussi bien