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— Vous gagneriez votre pari si vous l’aviez fait sérieusement, répliqua M. Grewgious. Cependant je pense que nous devrions être indulgents pour les petites délicatesses d’une jeune fille qui n’a plus sa mère, dans de semblables conjonctures ces choses-là ne sont guère de ma compétence… Et de la vôtre ?… Qu’en pensez-vous ?…

— Tout cela ne fait pas l’objet d’un doute.

— Je suis heureux de vous entendre parler ainsi, continua M. Grewgious qui avait manœuvré avec adresse, se souvenant fort bien de ce que Rosa lui avait dit à propos de M. Jasper. Il m’a semblé voir qu’un instinct délicat faisait désirer à Mlle Bud que tous les arrangements préliminaires eussent lieu directement entre elle et Edwin Drood, comprenez-vous ? Elle n’a pas besoin de nous, n’est-ce pas ? »

Jasper fit un geste.

« Vous voulez dire qu’elle n’a pas besoin de moi ? répliqua-t-il.

— Non, fit M. Grewgious, j’ai bien voulu dire qu’elle n’avait pas besoin de nous. En conséquence, laissons les jeunes gens s’arranger ensemble quand M. Edwin Drood reviendra aux fêtes de Noël. Nous interviendrons ensuite pour terminer définitivement les affaires.

— Ainsi, vous avez arrêté avec elle que vous reviendrez aux fêtes de Noël ? fit observer Jasper. Vous voyez, monsieur Grewgious, il existe, comme vous le disiez fort bien tout à l’heure, un attachement si rare entre mon neveu et moi, que je suis plus sensible à tout ce qui intéresse ce cher, ce fortuné, cet heureux garçon, qu’à ce qui me touche moi-même. Cependant c’est toute justice que l’on ait égard aux désirs de la jeune fille. Je dois accepter la marche que vous m’avez tracée, je l’accepte donc. Il est entendu qu’aux fêtes de Noël les jeunes gens feront tous leurs arrangements pour le mois de mai et prendront entre eux une décision définitive au sujet de ce mariage. Il ne nous restera plus qu’à prendre nous-mêmes nos dispositions et à nous tenir prêts à rendre nos comptes de tutelle pour le jour de la naissance d’Edwin Drood.

— C’est ainsi que je l’entends, dit M. Grewgious en