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— Pour cela, dit M. Grewgious en inclinant la tête dans la direction de la croisée, nous devons nos remercîments les plus chaleureux, et je paye cette dette avec empressement, à la tendresse maternelle et aux soins constants et dévoués de la dame que j’ai l’honneur de voir en ce moment devant moi. »

Ce n’était encore qu’un point de départ assez boiteux : le compliment de M. Grewgious n’arriva pas à son adresse. Mlle Twinkleton, comprenant que la politesse exigeait qu’elle ne parût pas être à la conversation, mordit la barbe de sa plume et regarda en l’air, comme si elle attendait que l’une des neuf sœurs lui envoyât une idée.

M. Grewgious épongea de nouveau sa tête parfaitement sèche et consulta encore son agenda.

Tout d’abord il effaça : En bonne santé et heureuse, comme un article épuisé.

« Livres, shillings, et deniers ; voici ma seconde note. Un sujet aride pour une jeune demoiselle, mais qui a son importance. La vie est une question de livres, de shillings, et de deniers. La mort est… »

La pensée soudaine de la mort du père et de la mère de Rosa l’arrêta court, et il dit d’un ton plus bas :

« Non, la mort n’est pas une question de livres, de shillings, et de deniers. »

La voix de M. Grewgious était aussi âpre, aussi sèche que lui-même.

Et pourtant, quelque limités que fussent les moyens d’expression que possédait cette ingrate physionomie, elle respirait la bonté.

Si seulement la nature avait fini ce visage, la tendresse du cœur s’y serait lue en ce moment.

Mais si les aspérités du front de M. Grewgious ne voulaient pas se polir, si cette physionomie rudimentaire qu’il voulait faire mouvoir était incapable de rendre aucun sentiment, qu’y pouvait ce pauvre homme ?

« Livres, shillings, et deniers. Vous trouvez toujours votre allocation suffisante à la satisfaction de vos besoins, ma chère ? »

Rosa n’avait besoin de rien, par conséquent l’allocation était amplement suffisante.