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n’avoir été que grossièrement ébauchés ; certaine entaille sur son front faisait penser que la nature, au moment de mettre sur cette figure l’expression et le fini, avait jeté le ciseau de colère en disant : « Véritablement, je ne me donnerai pas l’ennui de finir ce vilain homme ; qu’il reste comme il est. »

La partie supérieure du cou de M. Grewgious était trop longue ; ses chevilles et ses talons trop osseux ; il avait, des pieds à la tête, un air gauche et embarrassé, une démarche contrainte, et avec cela la vue si courte, qu’il était incapable de voir lui-même le contraste déplaisant que ses longs bas blancs en coton formaient avec ses vêtements noirs.

Et pourtant, M. Grewgious avait en lui je ne sais quel étrange privilège qui faisait que l’ensemble de sa personne produisait presque une agréable impression.

M. Grewgious, lorsque sa pupille le joignit, se montra tout déconcerté d’être surpris en la compagnie de Mlle Twinkleton et dans la chambre consacrée à cette personne précieuse.

Il y avait été introduit malgré lui dans une vague appréhension d’être interrogé sur quelque chose et de ne s’en pas bien tirer.

Le pauvre homme se sentait fort oppressé dans cette position menaçante.

« Comment allez-vous, ma chère ?… Je suis heureux de vous voir… Comme vous êtes embellie, ma chère… Permettez-moi de vous offrir un siège, ma chère. »

Mlle Twinkleton se leva de son bureau en disant avec la grâce en usage dans le monde poli :

« Me permettez-vous de me retirer ?

— Certainement non ; pas à cause de moi. Je vous supplie de pas vous déranger.

— Je dois donc vous demander la permission de me déranger, répliqua Mlle Twinkleton, en répétant deux fois ces mots remarquables avec une amabilité charmante. Cependant je ne sortirai pas d’ici puisque vous êtes si obligeant., Si je transportais mon bureau dans l’embrassure de la fenêtre, ne vous gênerai-je pas ?

— Oh ! madame, me gêner…