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Le jeune homme aurait pu en trouver une plus mauvaise ; peut-être en aurait-il trouvé peu qui fussent meilleures.

Un nouveau coup discret frappé à la porte extérieure attira son attention, tandis qu’il descendait l’escalier.

Il ouvrit à M. Jasper tenant à la main le chapeau de son élève.

« Nous avons eu une effroyable scène avec lui, dit Jasper à voix basse.

— A-t-il été vraiment aussi mauvais ?

— Il a été cruel… sanguinaire !…

— Non… non… non…, fit M. Crisparkle, n’employez pas des expressions aussi fortes.

— Il aurait étendu mon cher enfant mort à mes pieds. S’il ne l’a pas fait, ce n’est pas sa faute. Il faut en remercier la miséricorde de Dieu qui m’a donné l’agilité et la force de prévenir un malheur. Il aurait massacré Edwin, chez moi. »

La phrase porta.

« Ah ! pensa M. Crisparkle, ce sont ses propres expressions !

— Après avoir vu ce que j’ai vu ce soir et entendu ce que j’ai entendu, ajouta M. Jasper d’un ton très-sérieux, je ne serai jamais tranquille tant qu’une rencontre entre eux sera possible et qu’il n’y aura personne pour s’interposer. C’était horrible !… Il y a du tigre dans le sang de ce jeune garçon.

— Ah ! pensa encore M. Crisparkle, c’est ce qu’il dit de lui-même.

— Mon cher monsieur, poursuivit Jasper en lui prenant la main, vous-même vous avez accepté là une dangereuse charge.

— Ne redoutez rien pour moi, monsieur Jasper, répliqua M. Crisparkle, avec un tranquille sourire, je n’ai aucune crainte pour moi personnellement.

— Je ne crains rien non plus pour moi-même, reprit M. Jasper en appuyant sur le pronom personnel. Je ne suis pas en hostilité avec lui et n’ai pas de raison pour m’y trouver jamais… Mais il n’avait pas de raison non plus d’en vouloir à mon cher enfant. Bonne nuit ! »