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— Je suis convaincu, ma chère Amy, reprit M. Sparkler, que, s’il existe au monde une fille… après votre spirituelle et charmante sœur qui n’est pas du tout…

— Nous savons cela, Edmond, interrompit Mlle Fanny. Ce n’est pas la peine de le répéter. Passez à autre chose.

— Oui, mon amour. Et je vous assure, Amy, que rien ne peut me causer plus de joie… sauf, bien entendu le bonheur et l’honneur d’être agréé par une fille ravissante, qui n’a pas l’ombre de…

— Voyons, Edmond, voyons ! interrompit de nouveau Fanny avec un mouvement impatient de son petit pied.

— Mon amour vous avez parfaitement raison. C’est une mauvaise habitude. Ce que je voulais dire, c’est que rien au monde, excepté le bonheur d’être uni à la plus adorable des filles… ne saurait me causer plus de joie que de pouvoir cultiver la connaissance affectueuse d’Amy. Il se peut, continua M. Sparkler avec une courageuse franchise, que je ne sois pas très-fort, lorsqu’il s’agit de comprendre certaines choses, et je sais fort bien que, si vous interrogiez sur mon compte la société en général, on vous en dirait autant ; mais, pour ce qui est d’apprécier Amy, je ne le cède à personne ! »

Et, pour le prouver, M. Sparkler embrassa la petite Dorrit.

« Une place à notre table, une chambre dans notre maison, poursuivit-il, devenant très-diffus pour un orateur de sa force, seront toujours à la disposition d’Amy lorsqu’il lui plaira de les accepter. Mon gouverneur, j’en suis sûr, sera toujours heureux d’accueillir une personne pour laquelle j’ai tant d’estime. Quant à ma mère, qui est une très-belle femme sans aucune espèce de…

— Edmond, Edmond ! s’écria Fanny avec le même geste que la première fois.

— J’obéis, mon âme, répliqua M. Sparkler d’un ton soumis. Je sais que c’est une mauvaise habitude que j’ai et je vous remercie beaucoup, mon adorable, de vous donner tant de peine pour m’en corriger ; mais tout le monde convient que ma mère est une très-belle femme et elle n’a vraiment pas l’ombre de…

— C’est possible, c’est possible, je ne dis ni oui ni non, interrompit la future, mais ne parlez plus de cela, je vous prie.

— Plus un mot, mon amour.

— Alors vous n’avez plus rien à dire, Edmond ? n’est-ce pas ? demanda Fanny.

— Au contraire. J’en ai déjà tant dit, mon adorable, répondit M. Sparkler, qu’il ne me reste plus qu’à vous demander pardon d’avoir parlé si longuement. »

M. Sparkler devina tout à coup, par une espèce d’inspiration, que cette question voulait dire : « Ne feriez-vous pas bien de vous en aller ? » Il retira donc son bras fraternel, et annonça très-adroitement qu’avec la permission de Fanny, il allait prendre congé. Il ne s’éloigna pas sans avoir reçu les félicitations d’Amy, qui, dans son chagrin, eut assez de peine à s’acquitter de ce devoir.