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avait raconté tous ces détails (appuyés par une foule de documents), au chevet d’Arthur. Il dit alors qu’il allait relancer M. Rugg, et dans son agitation, le remorqueur paraissait avoir besoin de faire encore quelques petites courses après. Enfin, rassemblant ses papiers, il descendit l’escalier et s’éloigna à grande vitesse, après avoir échangé avec Clennam, une dernière poignée de main.

Arthur, cela va sans dire, résolut de se rendre à l’instant même chez M. Casby. Il mit tant d’empressement à sortir qu’il se trouva au coin de la rue Patriarcale, près d’une heure avant l’arrivée de la petite Dorrit, mais il ne fut pas fâché d’avoir le temps de faire un tour de promenade paisible pour se calmer.

Lorsqu’il revint dans la rue et souleva le brillant marteau de cuivre, la bonne lui dit que la petite couturière y était. On le conduisit en haut, au salon de Flora. La jeune fille ne s’y trouvait pas, il n’y avait que Flora, qui témoigna la plus vive surprise de le voir.

« Bonté divine, Arthur… Doyce et Clennam, veux-je dire ! s’écria cette dame. Qui se serait jamais attendu à une pareille visite ?… excusez mon peignoir… car vraiment je ne songeais guère à vous voir… et un peignoir de cotonnade fanée encore, ce qui est bien pis… mais ma petite amie est en train de me faire… au fait pourquoi éprouverais-je de l’embarras à parler de cela devant vous ? vous savez bien ce que c’est… une jupe, et, comme je devais l’essayer ce matin après déjeuner, je suis restée en robe de matin… j’y ferais moins attention encore si elle était mieux empesée ! »

— C’est à moi à m’excuser, répondit Arthur, d’une visite si matinale et si brusque ; mais vous me pardonnerez, lorsque vous connaîtrez le motif qui m’amène.

— Du temps de ces jours à jamais envolés, Arthur, répliqua Mme Finching ; pardonnez-moi…. Doyce et Clennam serait beaucoup plus convenable, quoique plus froid… mais voilà que je perds le fil de mon sujet, car vous m’avez fait oublier ce que je voulais vous dire. »

Elle lança une tendre œillade à Clennam et reprit :

« Dans ces jours à jamais envolés, allais-je dire, il eût été bien étrange en vérité qu’Arthur Clennam… Mais Doyce et Clennam, c’est bien différent… se crût obligé de faire des excuses, à quelque heure de la journée qu’il se présentât…, mais ces jours sont passés, et le passé ne saurait revenir excepté, comme le disait ce pauvre M. Finching lorsqu’il était de bonne humeur, les concombres qu’il ne pouvait digérer… »

Flora qui était en train de faire le thé à l’arrivée d’Arthur, termina à la hâte ses préparatifs.

« Papa, reprit-elle tout bas d’un ton plein de mystère, tandis qu’elle abaissait le couvercle de la théière dans laquelle elle venait de verser de l’eau bouillante, est occupé à manger son œuf frais dont il brise la coque absolument comme un pivert, dans la salle