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Blandois ayant déclaré qu’il était enchanté, ils traversèrent les autres mansardes, divers couloirs, et descendirent. Avant de se retrouver sur l’escalier, M. Flintwinch avait découvert que le visiteur ne regardait nullement les chambres, mais qu’après avoir jeté autour de lui un coup d’œil rapide, il se remettait à examiner son guide. Intrigué par cette découverte, il se retourna au milieu de l’escalier pour faire une autre expérience. Ses yeux rencontrèrent immédiatement ceux de M. Blandois ; ils se regardèrent fixement l’un l’autre ; le visiteur, avec ce méchant mouvement de son nez et de sa moustache, se mit à rire, ainsi qu’il l’avait fait à chaque fois d’un petit rire diaboliquement silencieux.

Comme M. Flintwinch était beaucoup moins grand que le visiteur, il y avait pour lui un désavantage physique à se voir aussi désagréablement dévisagé d’en haut ; et comme, en outre, il descendait le premier et se trouvait presque toujours à une ou deux marches au-dessous de l’autre, ce désavantage était encore plus grand en ce moment. Il attendit, pour regarder de nouveau M. Blandois, que cette inégalité supplémentaire n’existât plus, c’est-à-dire qu’ils fussent entrés dans la chambre de feu M. Clennam. Mais alors il se dédommagea en se tournant à l’improviste sur son hôte, qu’il retrouva toujours occupé à l’examiner.

« Cette vieille maison est vraiment charmante, dit M. Blandois en souriant. Si mystérieuse ! Vous n’entendez jamais des bruits surnaturels ici ?

— Des bruits ? Non.

— Il n’y vient jamais de démon ?

— Il n’en vient jamais ; du moins, répondit M. Flintwinch en faisant un pas oblique vers son interlocuteur, il n’en vient pas qui se présentent sous ce nom et en cette qualité.

— Ha, ha !… C’est un portrait, je crois ?

(Il continuait à regarder M. Flintwinch, comme si M. Flintwinch eût été le portrait en question.)

— En effet.

— Oserais-je vous demander le nom de l’original ?

— C’est feu M. Clennam. Le mari de mon associée.

— Et ci-devant propriétaire, sans doute, de cette remarquable montre que j’ai admirée là-haut ? » ajouta le visiteur.

M. Flintwinch, qui avait jeté un coup d’œil sur le portrait, se retourna et reconnut encore qu’il était l’objet de l’examen attentif de M. Blandois, dont le nez s’abaissait et dont la moustache se relevait toujours.

« Oui, monsieur Blandois, répliqua-t-il d’un ton aigre, cette montre lui a appartenu et elle a appartenu à son oncle avant lui, et à je ne sais plus qui encore auparavant ; voilà tout ce que je puis vous dire de sa généalogie.

— C’est un esprit d’une trempe vigoureuse, monsieur Flintwinch, que celui de notre malade.

— Oui, monsieur, répondit Jérémie, se tortillant encore en