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d’avidité sauvage se troublèrent. Un cruel désenchantement, une surprise mortelle se peignit en même temps sur son visage blêmi. Il mit sa tête dans ses mains pour réfléchir, puis il se décida, prit copie de ces papiers qu’il venait de lire, les remit dans la boîte, la boîte à sa place, dans la chambre noire, referma la porte de chêne, éteignit la bougie, et s’esquiva par la croisée.

Tandis que le voleur, le meurtrier, franchissait le mur du jardin, le notaire, accompagné d’un étranger, s’arrêtait devant sa maison, tenant sa clef dans la main.

— De grâce, Monsieur Bintrey, — disait-il, — ne passez pas devant chez moi sans me faire l’honneur d’y entrer. C’est presque un jour de fête dans la ville… le jour de notre tir… mais tout le monde sera de retour avant une heure… N’est-il pas plaisant que vous vous soyez justement adressé à moi pour demander le chemin de l’hôtel… Eh bien, buvons et mangeons ensemble, avant que vous vous y rendiez.

— Non, pas ce soir, — répliqua Bintrey, — je vous remercie. Puis-je espérer de vous rencontrer demain matin vers dix heures ?

— Je serai ravi de saisir l’occasion la plus prompte de réparer, avec votre permission, le mal que vous faites à mon client offensé, — repartit le bon notaire.

— Oui, oui, — fit Bintrey, — votre client offensé ! C’est bon ! Mais un mot à l’oreille, Monsieur Voigt.

Il parla pendant une seconde à voix basse et continua sa route. Lorsque la femme de charge du no-