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tion, Monsieur, à vous qui, avec tant de confiance, avez pris sous votre protection et à votre service un homme si cruellement outragé.

— Tenez-vous l’esprit tranquille, — interrompit Maître Voigt. — Pas un mot de plus sur ce sujet, et pas de remercîments. Soyez ici demain matin, avant l’arrivée de l’autre clerc, entre sept et huit heures ; vous me trouverez dans cette chambre. Je veux vous initier moi-même à votre besogne… Maintenant, allez-vous-en, allez-vous-en. J’ai des lettres à écrire ; je ne veux pas entendre un mot de plus.

Congédié avec cette brusquerie amicale, et satisfait de l’impression favorable qu’il avait produite sur l’esprit du vieillard, Obenreizer put réfléchir à son aise. Alors la mémoire lui revint de certaine note qu’il avait prise mentalement durant cet entretien. Ainsi donc, Maître Voigt avait eu jadis un client dont le nom était Vendale.

— Je connais assez bien l’Angleterre à présent, — se disait-il tout en faisant courir ses pensées devant lui, assis sur un banc devant le parterre. — Ce nom de Vendale y est bien rare. Jamais je n’avais rencontré personne qui le portât avant…

Il regarda involontairement derrière lui par-dessus son épaule.

— Le monde est-il en effet si petit, que je ne puisse m’éloigner de lui, même après sa mort ?… Il m’a confessé à ses derniers moments qu’il avait trahi la confiance d’un homme qui est mort comme lui… qu’il jouissait d’une fortune qui n’était pas la sienne… que je devais y songer ! Et il me demandait de m’éloigner