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une envie diabolique de répondre que c’est le vent qui en était cause et de résigner son emploi ; mais il étouffe ce désir et continue ses analyses.

« Après un instant d’agitation pour ainsi dire convulsive, bébé a frotté ses petites mains l’une contre l’autre et s’est mis à sourire. » Anastasia faisant ici une longue pause, mister Podsnap se figure qu’il est obligé de demander pourquoi ?

« Ne seraient-ce pas, me suis-je dit alors, répond Anastasia en cherchant son mouchoir, ne seraient-ce pas les fées qui lui apprennent que bientôt son papa sera Membre du Parlement ? »

Anastasia est tellement subjuguée par l’émotion que tous les convives sont obligés de se lever pour faire place à Vénéering, qui se précipite vers elle, et emporte ce corps insensible, dont les pieds traînent sur le tapis d’une façon émouvante.

Les fées ont-elles parlé des cinq mille livres, et bébé en a-t-il été satisfait ? Personne ne se le demande.

Le pauvre Twemlow, qui n’en peut plus, est profondément touché. Il continue de l’être après son retour au-dessus des écuries de Duke-street ; mais étendu sur son canapé, ce doux et timide gentleman est frappé d’une idée terrible qui chasse toute émotion. « Miséricorde ! maintenant que j’y pense, ce Vénéering n’avait jamais vu un seul de ses commettants avant la visite qu’il leur a faite aujourd’hui. »

Après avoir parcouru sa chambre, l’esprit dans une affreuse angoisse, la main portée à son front, l’innocent Twemlow revient à son canapé et murmure d’une voix gémissante : « Cet homme me tuera ou me rendra fou. Il est venu trop tard dans ma vie ; je n’ai plus la force de le supporter ! »

IV

OÙ CUPIDON EST SOUFFLÉ


Pour nous servir du froid langage du monde, missis Lammle et miss Podsnap ont fait promptement connaissance. Pour employer l’ardent langage de missis Lammle, elle et sa chère Georgiana se sont rapidement unies d’esprit et de cœur.

Toutes les fois que Georgiana peut échapper à l’esclavage de