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comment, avec instante prière de ne pas chercher à en savoir davantage. C’est, à ce qu’on lui assure, une dette, une restitution. Il a consulté à ce sujet son ancien employé, qui a été d’avis qu’il pouvait accepter cette rente sans scrupule. Elle provient sans doute de quelque créance oubliée du temps de la Maison.

Le célibataire aux yeux en amande, n’est plus célibataire : il a épousé la sœur du subalterne aux cheveux gris. Il va voir quelquefois son ancien chef, mais rarement. John Carker a, dans son histoire et dans son nom, surtout, une raison pour rester à distance de M. Dombey, et comme il demeure avec sa sœur et son mari, ils vivent, comme lui, retirés. Walter va les visiter quelquefois, Florence aussi, et la jolie petite maison résonne des duos arrangés pour piano et violoncelle, et des coups de marteaux des forgerons harmonieux.

« Et comment va le petit Aspirant de marine dans ces nouveaux jours ?

— Mais il est toujours là, la jambe en avant, surveillant avec la même vigilance les fiacres qui passent, et l’œil plus perçant que jamais, car il a été repeint à neuf, depuis son chapeau à trois cornes jusqu’aux boucles de ses souliers ; et au-dessus de sa tête, brillent, en lettres d’or, les noms réunis de Gills et Cuttle.

Le petit Aspirant de marine n’a pas beaucoup étendu son commerce, mais on dit, dans un espace d’environ un demi-mille autour du parapluie bleu de Leadenhall-Market, que d’anciens placements de M. Gills lui ont rapporté de beaux bénéfices. Au lieu d’être en arrière du siècle à cet égard, comme il le pensait, il était plutôt en avant, disait-on, et n’avait eu qu’à attendre l’heure et l’instant favorables. On ajoute tout bas que son argent commence à rouler et à rouler gaillardement. Ce qu’il y a de certain, c’est que, debout à la porte de sa boutique, avec son habit café, son chronomètre dans sa poche et ses lunettes sur le front, il n’a pas l’air de se désoler si les chalands ne l’importunent pas. Au contraire, il a l’air le plus riant et le plus heureux, quoique toujours aussi vaporeux que par le passé.

Quant à son associé, le capitaine Cuttle, il se fait sur le commerce des illusions qui valent mieux que la réalité. Le capitaine est aussi heureux de l’importance du petit Aspirant de marine dans le commerce et la navigation de tout le pays, que s’il était impossible à un vaisseau de quitter le port de Londres sans le secours du petit Aspirant. Voir son nom sur la porte de la bou-