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me pardonne aussi, et qu’au fond du cœur elle souffre. Vous ne l’oublierez pas, n’est-ce pas ?

— Jamais, Alice !

— Encore un instant. Tournez ma tête, comme cela, mon amie, pour que je puisse lire les mots sur votre visage, à mesure que vous les lirez dans le livre. »

Henriette obéit et commença sa lecture. Elle lut ce livre éternel écrit pour les âmes fatiguées, accablées ; pour les malheureux, les pécheurs, les pauvres abandonnés sur cette terre. Elle lut l’histoire sainte, cette histoire dans laquelle l’aveugle, le boiteux, le paralytique, le criminel, la pécheresse, les réprouvés trouvent une consolation que l’orgueil, l’indifférence, les sophismes des hommes, pendant tout le temps que durera le monde, ne pourront leur enlever ou diminuer d’un atome. Elle lui lut la vie de Celui qui a eu pour tous les hommes, pour toutes leurs espérances comme pour toutes leurs douleurs, depuis le berceau jusqu’à la tombe, depuis l’enfance jusqu’à la vieillesse, une tendre compassion, un touchant intérêt pour toutes les phases, toutes les périodes de leur existence, pour toutes leurs souffrances, pour toutes leurs misères.

« Je reviendrai, dit Henriette en fermant le livre, demain matin de bonne heure. »

Les yeux ardents d’Alice, qui étaient restés fixés sur elle, se fermèrent un moment, puis se rouvrirent, et elle l’embrassa en la bénissant.

Les mêmes yeux la suivirent jusqu’à la porte, et quand la porte fut refermée, un doux sourire brillait encore dans leur regard brillant comme sur son calme visage.

Ils ne se détournèrent plus jamais. Elle mit sa main sur sa poitrine, murmura le nom sacré qu’Henriette avait prononcé, et la vie se retira de sa figure comme une lumière qui passe.

Il ne restait plus là que les ruines de cette demeure mortelle qui avait été battue par la pluie et l’orage, rien que ces cheveux noirs qui avaient flotté pendant une nuit d’hiver au gré des vents.