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laisse apercevoir au travers du brouillard qu’au coin des rues, dans les petites places où se trouve soit un arbre, soit une des nombreuses églises dont nous avons parlé ; dans de petits espaces pavés garnis d’escaliers, dans un petit coin de jardin, dans un cimetière au milieu duquel on ne voit plus que quelques tombes ou quelques pierres tumulaires toutes noires. Pleine de confiance et d’amour, à travers les étroits passages et les rues sombres, Florence marche toujours appuyée sur le bras de celui dont elle va devenir la femme.

Son cœur bat plus vite en ce moment, car Walter vient de lui dire que leur église est proche. Ils laissent derrière eux de grands magasins devant lesquels sont arrêtés des camions avec les charretiers affairés qui barrent le passage ; mais Florence ne les voit ni ne les entend : et bientôt tout devient calme, le jour est plus sombre, et elle tremble dans une église humide comme une cave.

Le vieux petit bonhomme râpé, le sonneur de la cloche désappointée qui n’attire pas les fidèles, est assis sous le porche : il a posé son chapeau sur les fonts baptismaux, car il est là comme chez lui : n’est-il pas en même temps suisse, sonneur et fossoyeur ?… Il les introduit dans une sacristie toute délabrée, garnie de panneaux bruns tout couverts de poussière : on dirait un buffet dont on a retiré les planches. Les registres, mangés aux vers, ont un goût de tabac éventé qui fait éternuer Nipper tout en larmes.

Mais comme elle paraît jeune, comme elle paraît belle, la mariée, dans ce lieu si délabré, si plein de poussière, sans autre parent que son époux ! Il y a un acolyte, vieux et poudreux, qui tient une échoppe de journaux ouverte à tous les vents, sous une porte cochère en face, derrière un rempart de poteaux où sont suspendues ses gazettes. Il y a une loueuse de chaises, vieille et poudreuse, qui n’a pas d’autre occupation que de s’occuper d’elle, et qui trouve que c’est déjà bien assez comme cela. Il y a un bedeau vieux et poudreux (ce sont ces deux derniers personnages qu’a vus M. Toots le dimanche précédent). Le bedeau, par exemple, ne se borne pas à ce genre de commerce, il est au service d’une société de charité qui tient séance dans une salle voisine, dont les croisées sont garnies de vitraux par où jamais l’œil d’un mortel ne s’est permis de regarder. L’autel est décoré de frises en bois et de corniches remplies de poussière ; les mêmes ornements se remarquent autour de la galerie et au-dessus de l’inscription qui relate ce qu’ont fait