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conduisit en haut. Là, il crut que c’était le moment ou jamais de faire une bonne plaisanterie.

« Eh ! bien, Walter, mon garçon, dit le capitaine en passant par la porte sa tête assez semblable à une gracieuse bassinoire, eh ! bien, la chose n’a pas d’autre caractère, hein ! dites donc ? »

Il riait à étouffer de cette plaisanterie rétrospective qu’il répéta plus de vingt fois pendant le thé, et dans les intervalles il frottait sa figure rayonnante de bonheur avec la manche de son habit, et s’épongeait la tête tout partout avec son mouchoir. Mais il avait encore une source de jouissance plus sérieuse à sa disposition, et on l’entendit plus d’une fois répéter à demi-voix, en jetant un regard d’ineffable délice sur Walter et Florence :

« Édouard Cuttle, mon garçon, vous n’avez jamais eu de votre vie une plus heureuse idée que le jour où vous avez donné votre petit avoir conjointement. »



CHAPITRE XIII.

M. Dombey et le monde.


Que fait-il cet homme fier, pendant que les jours s’écoulent ? Pense-t-il à sa fille ? se demande-t-il où elle peut être allée ? Croit-il qu’elle soit revenue à la maison, pour reprendre dans la triste demeure son ancienne existence ? Il n’y a que lui qui puisse le dire. Il n’a jamais prononcé une seule fois son nom depuis. Les gens de la maison le craignent trop pour oser aborder un sujet sur lequel il semble avoir pris la ferme résolution de garder le silence : il fait taire immédiatement la seule personne qui ose le questionner.

« Mon cher Paul ! disait tout bas sa sœur, entrant dans la chambre le jour du départ de Florence ! Votre femme ! Cette parvenue ! Ce que j’ai vaguement entendu dire serait-il vrai ? est-ce ainsi qu’elle vous remercie de votre dévouement sans bornes pour elle ? vous qui, je ne le sais que trop, avez sacrifié vos propres parents à ses caprices et à sa fierté ! Pauvre frère ! »