Page:Dickens - Dombey et fils, 1881, tome 3.djvu/194

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fortune et je ne sais qu’en faire. Si cela pouvait servir à quelque chose ici, au point de vue pécuniaire, je descendrais avec une douce satisfaction dans le silence de la tombe. »

M. Toots n’en dit pas davantage ; il s’esquiva tout doucement et ferma la porte sur lui, pour couper court à toute réponse.

Florence pensa à cette bonne créature, longtemps après qu’il l’eut quittée, et elle y pensa avec un mélange de peine et de plaisir. Il était si honnête, il avait le cœur si bon, que le revoir et pouvoir compter sur lui dans son malheur, était pour Florence une joie et une consolation incomparables, mais en même temps aussi elle éprouvait un tel chagrin d’avoir été pour lui sujet de peine et d’avoir troublé le calme de son existence, qu’elle pleurait sincèrement et le plaignait de tout son cœur. Le capitaine Cuttle pensait aussi beaucoup à M. Toots, mais d’une autre façon ; Walter, de son côté, y pensait aussi, et quand le soir arriva, et que tous trois furent réunis dans la chambre de Florence, Walter fit de lui un éloge sincère, et raconta à Florence ce qu’il avait dit en quittant la maison ; il le fit avec toute la générosité d’un cœur aimant et sympathique.

M. Toots ne revint ni le lendemain, ni le surlendemain, ni plusieurs jours après. Pendant ce temps-là, Florence, sans la moindre inquiétude, vivait au haut de la maison de l’opticien, tranquille comme l’oiseau en cage. Mais, plus le temps s’écoulait, plus Florence changeait et dépérissait. Souvent, appuyée sur sa fenêtre, elle levait vers le ciel son visage empreint de cette même expression mélancolique que l’on avait remarquée sur celui du petit Paul ; elle semblait chercher des yeux le petit ange, étendu dans son lit, sur le brillant rivage dont il avait parlé tant de fois.

Depuis bien des années, elle était faible et délicate, et santé se ressentait des tourments passés. Mais, en ce moment, elle n’éprouvait aucune souffrance physique. C’était le cœur qui chez elle était malade, et Walter en était la cause.

Bien que toujours occupé d’elle, attentif à ses moindres désirs, fier et heureux d’être à ses ordres, et mettant à tous les soins dont il l’entourait cette ardeur et cet élan chaleureux qui lui étaient naturels, Florence s’apercevait qu’il cherchait à l’éviter. Pendant la journée, il approchait rarement de sa chambre. Si elle le demandait, il venait à son appel et reprenait pour un instant cette vivacité et cette sérénité qu’elle