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regarde comme son frère adoptif, mais moi, combien je serais coupable si je m’attribuais le moindre droit de profiter du caractère qu’elle me donne pour entrer dans sa familiarité, si j’allais oublier qu’en mon âme et conscience je ne dois pas le faire !

— Walter, mon garçon, insinua le capitaine comme pour se relever d’un échec qu’il venait d’essuyer, n’y a-t-il pas un autre caractère que celui de…

— Oh ! répliqua Walter, voudriez-vous me voir perdre son estime, l’estime de Florence ? J’irais mettre pour toujours un voile de honte entre moi et la figure de cet ange, en abusant de sa position dans cette maison, où elle est venue toute confiante et sans protection, pour avoir l’audace de me déclarer son amant. Que dis-je ? il n’y a personne au monde qui me blâmât plus que vous, capitaine, si je me rendais coupable d’une si vilaine action.

— Walter, mon garçon, dit le capitaine d’une voix de plus en plus languissante, pourvu qu’il n’y ait aucune cause et aucun empêchement légitime à l’union de deux personnes devant le Seigneur (ce que vous pourrez trouver dans la Bible et en prendre note si vous voulez), je crois pouvoir déclarer vos fiançailles comme si elles avaient été publiées à l’église. Ainsi, vous voyez que voilà toute la chose, et rien de plus, n’est-ce pas, mon garçon ? »

Walter fit de la main un signe négatif.

« Eh bien ! mon garçon, grogna tout bas le capitaine, je ne vous le dissimule pas, vous me voyez terrassé de ce coup-là, moi et mes projets. Mais quant à la charmante, Walter, souvenez-vous que votre respect et votre soumission sont des articles de mon Credo aussi bien que du vôtre, tout désappointé que je suis. Donc, nous naviguons dans les mêmes eaux, mon garçon ; je comprends sans aucun doute que vous agissez dans votre intérêt. Et voilà toute la chose : elle n’a pas d’autre caractère, dit le capitaine en rêvant sur les ruines de son château d’un air profondément affligé.

— Maintenant, capitaine Cuttle, dit Walter entamant un autre sujet d’un ton plus gai afin de lui donner un peu de courage… mais c’était inutile, il était trop affligé, je crois que nous ferions bien de chercher une personne convenable pour servir miss Dombey pendant qu’elle restera ici, une personne en qui l’on puisse avoir confiance. On ne peut s’adresser à ses parents pour lui en procurer une, car naturellement