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— Oui, monsieur.

— Pensez-vous qu’elle puisse… Vous savez, hein ?

— Je vous demande pardon, monsieur Toots, dit Suzanne, mais je ne vous comprends pas.

— Pensez-vous qu’elle puisse être amenée… vous savez, pas tout de suite, mais plus tard, dans bien longtemps, à… à… à m’aimer, vous savez ? Voilà ! dit le pauvre M. Toots.

— Oh ! cher monsieur, non, reprit Suzanne en secouant la tête, je peux bien dire jamais, jamais.

— Merci bien, dit Toots. Ça ne fait rien. Bonne nuit. Ça ne fait rien, merci bien. »



CHAPITRE VII.

L’agent fidèle.


Edith sortit seule ce jour-là et rentra bientôt. Dix heures venaient à peine de sonner, quand sa voiture entra dans la rue qu’elle habitait. Son visage exprimait toujours la même froideur qu’au moment de sa toilette, et la guirlande de fleurs qui ornait son front encadrait toujours le même sourcil froid et hautain. Mais on aurait préféré la voir de sa main arracher avec colère les feuilles et les fleurs de sa guirlande, ou froisser cette guirlande en cherchant dans son trouble un endroit pour y reposer sa tête égarée ; oui, on aurait préféré la voir en proie à la colère plutôt que de la voir ainsi froide et calme. Elle semblait si résolue, si fière, si impitoyable, qu’on eût dit que rien au monde n’était capable d’adoucir cette nature violente, et que tout dans la vie avait contribué à l’endurcir à jamais.

Arrivée à la porte de la maison, elle allait monter le perron, quand une personne, sortant doucement du vestibule, s’approcha la tête découverte, pour lui offrir le bras. Le domestique ayant été repoussé par le galant cavalier, elle ne pouvait faire autrement que d’accepter ce bras qu’elle reconnut bientôt.

« Comment se porte votre malade, monsieur ? dit-elle avec un sourire moqueur.