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Les fleurs, presque toutes, tombèrent des mains de Florence, celles, qui lui restaient encore furent mouillées, mais, hélas ! ce n’était pas par la rosée ! et elle cacha son visage dans ses mains défaillantes.

« Pauvre Florence ! chère et bonne Florence ! s’écria l’enfant.

— Savez-vous pourquoi je vous dis tout cela, Catherine ? dit la dame.

— Oui, ma tante ; c’est pour que je sois bonne pour elle et que je cherche à lui être agréable. Est-ce pour cela, ma tante ?

— Oui, dit la dame, il y a un peu de cela, mais c’est encore pour un autre motif. Nous avons beau la voir bien gaie, sourire agréablement à tout le monde, prête à nous rendre service à tous et disposée à prendre part à tous les divertissements : il est impossible qu’elle soit heureuse, n’est-ce pas, Catherine ? ne pensez-vous pas comme moi ?

— Ah ! non, elle ne doit pas être heureuse, dit la petite fille.

— Vous comprenez tout ce qu’elle doit souffrir, en voyant des parents aimer leurs enfants et s’en montrer fiers, comme il y en a justement beaucoup ici.

— Oui, bonne tante, je comprends tout cela très-bien. Pauvre Florence ! »

D’autres fleurs s’échappèrent encore des mains de Florence et jonchèrent le sol ; celles qu’elle tenait encore contre son sein tremblaient comme agitées par le souffle d’un vent d’hiver.

« Catherine, dit la dame, de cette même voix grave, mais douce et affectueuse, qui avait si vivement ému Florence la première fois qu’elle l’avait entendue, de toutes les jeunes filles qui sont ici il n’y en a pas qui puisse être pour elle, à raison de vos malheurs, une amie plus naturelle et moins capable de faire saigner son pauvre cœur. Vous ne pouvez pas comme le font, bien innocemment sans doute, des enfants plus heureux.

— Oh ! ma tante, interrompit l’enfant en se pendant à son cou, il n’y a pas d’enfants plus heureux que moi.

— Vous ne pouvez pas, ma chère Catherine, reprit la dame, lui rappeler son malheur comme d’autres enfants. Aussi, ma chère enfant, la perte que vous avez faite (grâce à Dieu avant que vous pussiez en sentir toute l’importance) vous crée, pour ainsi dire, un titre particulier pour chercher à vous faire ai-