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sur sa personne, semblaient, en se rétrécissant, en se collant sur lui, se conformer au désir que sa tournure exprimait de la tête aux pieds, de passer inaperçu dans l’incognito de son humble condition.

Cependant tout sentiment n’était pas mort en lui ; il conservait encore un vif intérêt pour la jeunesse avec ses rêves d’avenir, car il regardait avec une sympathie inaccoutumée la figure ardente du jeune homme pendant qu’il parlait ; mais quoi qu’il fît pour retenir prisonniers au fond de son cœur ses sentiments de compassion, ils éclataient malgré lui dans son regard plein de trouble. Quand Walter, à la fin, lui adressa la question qu’il avait faite à Florence, il regarda encore le jeune homme avec la même expression. On eût dit qu’il lisait dans ses traits quelque présage pour l’avenir, peut-être, hélas ! bien différent de sa joie du moment.

« Eh bien ! monsieur Carker, quel est votre avis ? dit Walter en souriant. Vous me donnez toujours de bons conseils, quand vous me parlez. Il est vrai que cela n’arrive pas souvent.

— Je crois que votre idée est bonne, dit M. Carker en portant ses regards de Florence à Walter et de Walter à Florence.

— Monsieur Carker, dit Walter entraîné par une pensée généreuse, tenez ! c’est une bonne chance pour vous. Allez trouver M. Dombey, comme messager d’une heureuse nouvelle. Cela pourra vous porter bonheur. Moi, je resterai à la maison, et vous irez à ma place chez M. Dombey, n’est-ce pas ?

— Moi ? répondit M. Carker.

— Mais certainement, dit le jeune homme ; et pourquoi pas, monsieur Carker ? »

Pour toute réponse, celui-ci lui serra la main ; mais il semblait rougir et craindre de faire le peu qu’on lui demandait ; il souhaita le bonsoir à Walter, et lui recommandant de se hâter, il continua son chemin.

« Venez, mademoiselle Dombey, dit Walter en le regardant s’en aller. Nous allons nous rendre chez mon oncle le plus vite possible. Avez-vous quelquefois entendu M. Dombey parler de M. Carker junior, mademoiselle Florence.

— Non, répondit l’enfant de sa voix douce, mais je n’entends pas souvent parler papa.

— Ah ! c’est vrai !… Tant pis pour lui, » pensa Walter.

Après quelques instants de silence, pendant lesquels il re-