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flots de gaze, de dentelles et de rubans dont elle s’était inondée pour faire honneur à la cérémonie.

« Comment vous portez-vous, miss Tox ? » dit M. Dombey.

Et comme il avait fait quelques pas pour venir à sa rencontre, miss Tox, pour reconnaître cette marque de distinction, disparut un moment, dans une profonde révérence, au milieu de ses flots de gaze. On eût dit une de ces lorgnettes de théâtre, qui rentrent en elles-mêmes, pour se fermer.

« Je n’oublierai jamais, monsieur, dit miss Tox de sa voix la plus douce, l’honneur que vous me faites aujourd’hui. En vérité, ma chère Louisa, je ne sais si je rêve ! »

Ce qui n’était certainement pas un rêve pour miss Tox, c’était le froid qu’elle ressentait. Aussi saisit-elle avec empressement la première occasion qui se présenta de frotter en cachette le bout de son nez avec son mouchoir pour rétablir la circulation, tant elle craignait que sa température, au-dessous de zéro, n’affectât désagréablement le petit Paul, quand elle irait l’embrasser.

L’enfant parut bientôt, porté en triomphe par Richard, pendant que la petite Florence, sous la garde de son infatigable constable, Suzanne Nipper, fermait la marche. Quoique bonnes et enfants eussent revêtu ce jour-là des vêtements de deuil moins sérieux, la vue de ces deux petits êtres, privés de leur mère, ne pouvait guère égayer la réunion. Paul, aussitôt entré, se mit à pleurer (le nez de miss Tox en était sans doute la cause), comme pour arrêter M. Chick dans son désir maladroit de faire des amitiés à Florence. Car, il faut le dire, si M. Chick n’avait pas grand goût pour les Dombey, et cela peut-être parce qu’ayant l’honneur d’être uni à une Dombey, il n’en savait que mieux ce qu’il fallait penser des perfections de la famille, néanmoins il aimait sincèrement Florence, il le témoignait volontiers, et il allait le prouver encore à sa manière, quand il entendit le petit Paul crier, et fut retenu à temps par sa femme.

« Allons, petite Florence, dit la tante vivement, que faites-vous là ? Montrez-vous à votre petit frère. Occupez-le, ma chère ! »

Si la température avait pu devenir plus froide, elle se serait abaissée au moment où M. Dombey, de son air glacial, s’arrêta pour regarder sa petite fille ; car Florence, en frappant dans ses mains, et en s’avançant sur la pointe des pieds jusqu’au trône de son fils et de son héritier, le força malgré lui de des-