rant et de lui dire au milieu de ses baisers : « Oh ! mon père, essaye de m’aimer, je n’ai plus que toi ! » Mais elle serait repoussée peut-être ; sa hardiesse pouvait offenser son père. Un mot seul l’aurait rassurée, l’aurait encouragée, et son cœur, qui débordait, ne demandait qu’à trouver à qui confier sa douleur, à qui donner son amour !
M. Dombey ne vit rien de tout cela. Il ne vit que l’indécision de l’enfant qui restait à la porte et le regardait ; il ne vit rien de plus.
« Entrez, dit-il, entrez. Qui peut donc l’effrayer ? »
Elle entra, et après avoir jeté autour d’elle un regard incertain, elle s’arrêta, les deux mains fortement serrées l’une contre l’autre.
« Venez ici, Florence, dit M. Dombey froidement ; est-ce que vous ne me reconnaissez pas ?
— Si, papa.
— N’avez-vous rien à me dire ? »
Elle regarda son père, mais les larmes qui roulaient dans ses yeux s’y glacèrent devant l’expression de ce visage sévère. Elle baissa la tête et tendit sa main tremblante. M. Dombey la prit négligemment dans la sienne et considéra un moment la petite fille d’un air presque aussi embarrassé qu’elle.
« Allons, soyez gentille, dit-il en lui donnant une petite tape sur la joue et lui jetant à la dérobée un regard troublé et incertain. Allez près de Richard, allez. »
La petite fille hésita encore, comme si elle eût voulu pourtant se jeter à son cou ; peut-être aussi espérait-elle qu’il allait l’enlever dans ses bras pour l’embrasser. Elle le regarda en face une fois encore ; M. Dombey retrouva dans ce regard l’expression qu’il avait remarquée cette nuit fatale, quand la petite fille s’était tournée vers le docteur ; il laissa retomber sa main et regarda d’un autre côté.
Il était facile de voir que Florence perdait beaucoup en présence de son père. Devant lui, elle n’avait ni dans ses paroles, ni dans ses mouvements, l’abandon de son âge. Polly s’en apercevait sans se décourager. Jugeant de M. Dombey par elle-même, elle espérait que les vêtements de deuil portés par Florence, parleraient pour la pauvre enfant. « Il serait par trop fort, pensait la bonne nourrice, qu’il s’attachât à un seul de ses enfants orphelins, quand il en a un autre devant les yeux, st une fille encore. »