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leur chambre. C’est qu’à la porte sont quatre chevaux noirs, tout empanachés. Les plumes tremblent au-dessus du char qu’ils traînent, et la foule curieuse s’arrête pour voir et les chevaux et le char et les hommes qui le suivent avec leurs écharpes et leurs bâtons. Le faiseur de tours, qui allait commencer à faire pirouetter sa cuvette au bout de sa canne, cache ses habits galonnés sous son large manteau, et sa pauvre femme épuisée par les fatigues de l’état, et toute courbée du côté droit sous le poids du lourd enfant qu’elle a sur les bras, flâne là un moment pour voir sortir la compagnie. Mais quand apparaît le triste fardeau, qui n’est pas bien lourd à porter, elle serre plus près son enfant contre son cœur ; et la plus jeune des jolies petites filles roses qui regardent à la haute croisée en face n’a pas besoin que sa bonne lui fasse signe de modérer sa gaieté, lorsque, étendant sa petite main potelée, elle se tourne vers elle pour lui demander : « Qu’est-ce que cela ? »

Voici maintenant paraître, au milieu des domestiques vêtus de noir et des femmes tout en larmes, M. Dombey. Il traverse le corridor et se dirige vers la seconde voiture qui l’attend. Les gens qui l’observent disent qu’il n’a pas l’air trop abattu par la douleur et le désespoir. Sa démarche est aussi droite, son maintien aussi roide qu’auparavant. Il ne cache pas sa figure dans un mouchoir et regarde droit devant lui. Peut-être ce visage est-il un peu altéré, un peu pâle, mais son expression n’a pas changé. Il prend place dans la voiture et trois messieurs le suivent. Puis, le cortége se met en marche lentement dans la rue. Les panaches se balancent encore dans le lointain, que le faiseur de tours a déjà planté sa cuvette au bout d’une canne et que la même foule fait cercle autour de lui. Mais la femme du faiseur de tours n’est pas aussi alerte à recueillir les sous, car les funérailles d’un enfant lui ont fait songer que son pauvre petit, enveloppé dans son mauvais châle, pourrait bien aussi ne jamais devenir un homme, ne jamais mettre sur sa tête un filet bleu-ciel, ne jamais porter un maillot couleur de chair, ne jamais faire la culbute dans la boue.

Les panaches continuent leur triste route dans les rues et approchent à la portée des sons d’une cloche. C’est dans la même église que le gentil enfant reçut tout ce qui restera bientôt de lui sur la terre, un nom. À côté de sa mère, on place son corps inanimé. C’est bien. Florence dans ses promenades