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cheminée sans feu, dont le foyer était masqué par un édifice élégant de papier gris festonné. Il regarda le capitaine, quand il entra, d’un air qui n’avait rien d’encourageant.

« M. Carker, sans doute ? dit le capitaine.

— J’aime à le croire, » dit M. Carker, en montrant toutes ses dents.

Le capitaine fut charmé de cette réponse accompagnée d’un sourire. C’était de bon augure.

« Vous voyez, dit le capitaine, en tournant ses yeux lentement autour de la petite chambre à peine assez grande pour y développer tout l’effet de son col de chemise ; je suis un marin, monsieur Carker, et Walter, qui est enrôlé ici, est presque mon fils.

— Walter Gay ? dit M. Carker, en montrant de nouveau toutes ses dents.

— Oui, justement, Walter Gay ! répondit le capitaine, dont le geste animé montra combien il était agréablement surpris de la vive perspicacité de M. Carker. Je suis l’ami intime de Walter et de son oncle. Peut-être, continua le capitaine, avez-vous entendu votre chef de file prononcer mon nom ? Je me nomme le capitaine Cuttle.

— Non, dit M. Carker en ouvrant la bouche plus grande encore qu’auparavant.

— Eh bien ! dit le capitaine, j’ai le plaisir de le connaître. Je me suis présenté chez lui sur la côte de Sussex avec mon jeune ami Walter, quand, — quand il s’est agi de ce petit arrangement ; vous vous rappelez, n’est-ce pas ? et le capitaine secoua la tête d’un air tout à fait sans façon, aisé et expressif.

— Je crois, dit M. Carker, que c’est moi qui ai eu l’honneur d’arranger moi-même l’affaire.

— Oui, justement, c’est bien cela ! répondit le capitaine. Maintenant, je dois vous dire que j’ai pris la liberté de venir ici…

— Veuillez vous asseoir, dit M. Carker en souriant.

— Je vous remercie, répondit le capitaine, profitant de l’offre qui lui était faite. Un homme assis doit être plus maître de ses idées dans la conversation. Ne prenez-vous pas un siège aussi ?

— Non, je vous remercie, répondit le gérant, le dos appuyé contre le marbre de la cheminée (sans doute par suite d’une vieille habitude contractée pendant l’hiver), et regardant le capitaine fixement de tous ses yeux et de toutes ses dents : vous avez donc pris la liberté, c’est vous qui le dites…