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sortant à moitié de la voiture, l’appelait de toutes ses forces. Il s’élança vers la voiture et reconnut dans la jeune femme Suzanne Nipper ! Suzanne Nipper, si agitée qu’elle en était toute hors d’elle-même.

« Staggs-gardens, monsieur Walter ! s’écriait miss Nipper. Oh ! monsieur Walter, où est Staggs-gardens, je vous en prie ?

— Eh ! qu’y a-t-il donc ? répondit Walter.

— Oh ! monsieur Walter, Staggs-gardens, je vous en prie, répéta Suzanne.

— Monsieur ! s’écria le cocher s’adressant à Walter dans un transport de désespoir, voilà la vie qu’elle me fait depuis plus d’une mortelle heure ; nous allons, nous venons, nous enfilons un tas de rues sans fond, où elle veut absolument que je passe ! Ah ! j’ai fait bien des courses avec cette voiture dans ma vie, mais je puis bien dire que je n’ai jamais vu pareil train.

— Désirez-vous aller à Staggs-gardens, Suzanne ? demanda Walter.

— Ah ! certainement qu’elle veut y aller, mais où est-ce ? grommela le cocher.

— Je ne sais pas où c’est ! s’écria Suzanne tout égarée. Monsieur Walter, je n’y suis venue qu’une fois avec miss Florence et notre pauvre cher petit Paul, le jour où vous avez trouvé Mlle Florence dans la Cité, car nous l’avions perdue, en revenant à la maison, Mme Richard et moi ; il y avait là un taureau furieux, et puis l’aîné des enfants de Mme Richard ; enfin j’y suis bien revenue une fois depuis, mais je ne me souviens plus de l’endroit, je crois qu’il est rentré sous terre. Ô monsieur Walter, ne m’abandonnez pas, Staggs-gardens, je vous en supplie ! Le petit chéri de miss Florence, notre chéri à tous ! le petit M. Paul, si doux, si gentil ! Ô monsieur, monsieur Walter !

— Grand Dieu ! s’écria Walter, est-il donc bien malade ?

— Le pauvre petit bouton de rose, s’écria Suzanne en se tordant les mains, il a demandé à revoir sa vieille nourrice, et je viens la chercher pour la mener à son chevet, cette chère Mme Staggs, de Polly Toodle-gardens ! »

Tout ému de ce qu’il venait d’apprendre et comprenant trop bien le trouble de Suzanne, maintenant qu’il savait ce qu’elle cherchait, Walter se mit à courir en avant avec une telle ardeur, s’informant tantôt ici, tantôt là, et à droite et à gauche,