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enfant dodu et joufflu ; un autre gros garçon tout aussi joufflu et non moins dodu, la suivait ; et la marche était fermée par un gros homme dodu et joufflu, qui portait sur son bras un autre enfant dodu et joufflu. Cet enfant, elle posa par terre, lui disant à l’oreille d’une voix enrouée :

« Ne lâche pas ton frère Jean.

— Ma chère Louisa, dit miss Tox, sachant votre inquiétude et désirant l’adoucir, j’ai couru au bureau royal des nourrices mariées, auquel vous n’aviez pas songé. Là, je m’adresse à la sage-femme et lui demande si elle peut me procurer une nourrice. « Non, » me répond-elle. J’étais désespérée pour vous. Mais une des femmes mariées de l’institution royale, qui avait entendu ma question, rappelle à la sage-femme qu’une autre venait de quitter le bureau pour retourner chez elle. Selon toute apparence, disait-elle, cette femme devait me convenir. À peine avais-je entendu ces mots de la bouche même de la sage-femme : « excellents renseignements, caractère irréprochable, » que je prends l’adresse et me voilà courant de nouveau.

— Comme une chère et excellente Tox que vous êtes, dit Louisa.

— Oh ! non pas, reprit miss Tox, ne dites pas cela. J’arrive à la maison (l’habitation la plus propre que vous puissiez imaginer, ma chère ; on y mangerait par terre). Je trouve toute la famille à table, et, comprenant que rien de ce que je pourrais dire ne vaudrait pour vous et pour monsieur Dombey, la vue de ces braves gens, je les ai tous amenés. Monsieur est le père, dit miss Tox, en montrant l’homme joufflu. Auriez-vous la bonté de vous avancer un peu, monsieur ? »

L’homme joufflu se plaça tout penaud devant la famille, la figure contractée par un rire niais et stupide.

« Voici sa femme, dit miss Tox, et elle montrait la jeune femme avec l’enfant. Comment allez-vous, Polly ?

— Pas mal, madame, je vous remercie, » dit Polly.

Pour la mettre adroitement en évidence, miss Tox lui avait adressé cette question comme à une vieille connaissance qu’elle n’aurait pas vue depuis une quinzaine.

« J’en suis bien aise, continua miss Tox. L’autre jeune femme est sa sœur ; elle n’est point mariée ; elle vit avec eux et prendra soin des enfants. Elle se nomme Jemima. Comment vous portez-vous, Jemima ?

— Pas mal, madame, je vous remercie, dit Jemima.