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rieux, qu’après avoir donné la main au docteur Blimber et avoir salué Mme Blimber et miss Blimber, il tira Paul à part, et lui dit : « Que pensez-vous de cela, Dombey ? »

Mais, malgré cette modeste confiance en lui-même, M. Toots semblait être dans la plus grande perplexité sur un point important. Fallait-il mettre le dernier bouton de son gilet, et, toutes réflexions faites, devait-on porter ses manchettes relevées ou non ? Ayant remarqué que celles de M. Feeder étaient relevées, M. Toots releva les siennes ; mais les manchettes du premier qui vint ensuite étant baissées, M. Toots baissa les siennes. Quant aux gilets, à mesure que les invités arrivaient en plus grand nombre, ils se trouvaient boutonnés de tant de manières différentes, soit en haut soit en bas, que M. Toots promenait continuellement ses doigts sur cet article de toilette, comme s’il eût joué un air sur un instrument, et finit par trouver cet exercice des plus fatigants à exécuter.

Tous les jeunes gens bien cravatés, bien frisés, bien chaussés, et le chapeau à la main, ayant été annoncés et introduit chacun à leur tour, M. Baps, le maître de danse, entra accompagné de Mme Baps, que Mme Blimber reçut avec une bonté parfaite et une condescendance marquée. M. Baps était un très-grave personnage, parlant lentement et en mesure. Il y avait à peine cinq minutes qu’il était sous le lustre, qu’il commença à parler à Toots, qui avait déjà eu le temps de comparer sans rien dire ses souliers vernis avec les siens.

« Monsieur, lui dit-il, que feriez-vous de vos matières brutes, si elles arrivaient dans les ports à la place de votre or ? »

La question embarrassa fort M. Toots, qui répondit :

« Il faudrait les dégrossir. »

Mais M. Baps n’eut pas l’air de trouver bon cet expédient.

Paul, à ce moment, se laissa glisser de dessus un des coussins du canapé où il avait établi son observatoire, et descendit dans la pièce où l’on devait prendre le thé, pour voir plus tôt arriver Florence. Depuis près de quinze jours, il ne l’avait pas vue, car il était resté chez le docteur Blimber le samedi et le dimanche précédents, de peur de s’enrhumer dehors. Justement elle arrivait : si jolie dans ses simples vêtements de bal, son bouquet de fleurs naturelles à la main, que Paul, quand elle se fut agenouillée pour jeter ses bras autour de son cou, et le couvrir de baisers (car il n’y avait dans la chambre que la bonne Mélia et une autre jeune femme pour l’aider à servir le thé), elle était si jolie, qu’il ne pouvait se décider à