Page:Dickens - Dombey et fils, 1881, tome 1.djvu/225

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour les mariages ? Ou bien si leur tintement lugubre n’était qu’un effet de l’imagination des vivants ? Puis, s’apercevant que sa nouvelle connaissance ne savait pas grand’chose sur la cloche du couvre-feu d’autrefois, Paul lui fit le récit de cette institution. Il lui demanda aussi, comme à un homme du métier, ce qu’il pensait de l’idée d’Alfred le Grand, de mesurer le temps en faisant brûler des chandelles ; à quoi l’ouvrier répondit que ce serait la ruine des horlogers, si l’on revenait jamais à ce système. Enfin, Paul continua de regarder l’horloge jusqu’à ce qu’elle eût repris son aspect habituel, et qu’elle eût recommencé sa monotone question, puis l’ouvrier déposant ses outils dans un panier long, lui dit adieu et s’en alla. Mais avant de sortir, il dit tout bas quelque chose au domestique sur le seuil de la porte ; Paul n’entendit que le mot rococo, mais, par exemple, ce mot-là, Paul l’entendit très-bien.

Rococo !… Qu’est-ce que cela voulait donc dire ? et pourquoi cet air triste dont tout le monde prononçait ce mot en parlant de lui ? Qu’est-ce que ce pouvait être ?

Comme il ne travaillait plus, il pensait à cela continuellement, et pourtant pas aussi souvent encore qu’il l’aurait fait s’il n’avait pas eu autant à penser. Mais il avait tant de choses dans la tête qu’il ne faisait que penser du matin au soir.

D’abord Florence allait venir à la soirée. Elle verrait que tous les élèves l’aimaient et cela la rendrait heureuse. Son idée principale était que Florence fût bien persuadée que l’on était bon pour lui, et qu’il était devenu le petit favori de la maison ; parce qu’alors elle penserait sans chagrin au temps qu’il avait passé chez le docteur. Et peut-être serait-elle moins malheureuse quand il la quitterait pour revenir.

Pour revenir !… Cent fois par jour ses petits pieds montaient sans bruit à sa chambre pour y prendre ses livres, ses paperasses, tous les petits riens qui lui appartenaient, pour les mettre en paquet et les emporter chez lui ! Quant au retour, il ne s’en inquiétait guère ; il ne faisait pour cela aucun préparatif ; il n’y avait songé que par occasion, en pensant à sa sœur. Bien au contraire, le but de toutes ses rêveries, de toutes ses allées et venues dans la maison, c’était de la quitter bientôt. Et que de choses, que de choses auxquelles il avait à penser tout le long du jour !

Il allait regarder furtivement ces chambres d’en haut et pensait à leur solitude quand il serait parti ; il se demandait pendant combien de jours, de semaines, de mois, d’années elles