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tomber. Mais arrivé là, il lui en échappa deux ; alors il tint le restant de la pile si serré qu’il put atteindre le terme du voyage avec la satisfaction de n’en avoir plus laissé tomber qu’un au premier et un autre dans le corridor. Quand il eut déposé dans la classe le corps d’armée, il remonta chercher les traînards. Ayant enfin réuni toute sa bibliothèque, il grimpa à sa place et se mit à l’ouvrage, encouragé par Tozer qui lui fit remarquer qu’il y était à présent pour tout de bon. Ce fut du reste la seule interruption jusqu’au déjeuner. À ce repas, servi d’une manière aussi grave et aussi comme il faut que les autres, Paul n’eut pas d’appétit, et quand on se fut levé de table, il suivit miss Blimber à l’étage supérieur.

« Maintenant, Dombey, dit miss Blimber, que vous semble de ces livres-là ? »

Ces livres renfermaient un peu d’anglais et beaucoup de latin ; des noms de choses, des déclinaisons d’articles et de substantifs, avec des exercices d’applications et des règles préliminaires, un petit bout d’orthographe, un coup d’œil sur l’histoire ancienne ; un ou deux points de vue sur la moderne ; item des tables de multiplication ; deux ou trois de poids et mesures, enfin un bon petit bagage de connaissances générales. Quand le pauvre Paul eut épelé le numéro deux, il s’aperçut qu’il n’avait plus la moindre idée du numéro un ; puis les débris de ce numéro vinrent se mêler malgré lui au numéro trois qui glissa sur le nombre quatre qui alla se raccrocher au numéro deux. De sorte que l’on eût pu lui demander si vingt Romulus font un Rémus, si l’adjectif hic, hæc, hoc était un poids métrique, si un verbe peut s’accorder avec un ancien Breton, si trois fois quatre font le signe du Taureau, toutes ces questions se confondant pêle-mêle dans le brouillamini de son esprit.

« Oh ! Dombey, Dombey ! dit miss Blimber, c’est détestable !

— Je crois, dit Paul, que si vous me permettiez de causer quelquefois avec le vieux Glubb, je pourrais mieux faire.

— C’est ridicule, Dombey, dit miss Blimber, je ne veux plus en entendre parler. On ne reçoit ici aucune espèce de Glubb. Vous ferez bien, Dombey, de descendre les livres l’un après l’autre et de vous perfectionner sur l’exercice de la journée, le sujet A, avant de passer au sujet B. Maintenant, prenez le livre d’en haut, Dombey, et revenez quand vous aurez approfondi la matière. »