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préparaient au repas comme s’ils n’étaient pas bien pressés d’aller y faire fête.

Le jeune Toots, qui était tout prêt d’avance, et qui, par conséquent, n’avait plus rien à faire, eut tout le temps de causer avec Paul ; il lui dit donc avec sa lourde et bonne nature :

« Asseyez-vous, Dombey.

— Je vous remercie, monsieur, » dit Paul.

Paul, à ce moment, faisait tous ses efforts pour se hisser sur une banquette très-élevée, près de la fenêtre, et retombait chaque fois qu’il croyait l’atteindre, ce qui sembla mettre Toots sur la voie d’une découverte.

« Vous êtes un tout petit bonhomme, dit M. Toots.

— Oui, monsieur, je suis petit, répondit Paul. Merci, monsieur, ajouta-t-il ; car Toots l’avait posé obligeamment sur son siège.

— Qui donc est votre tailleur ? demanda Toots après l’avoir regardé quelques moments.

— C’est une femme qui m’a fait mes habits jusqu’à présent, dit Paul. C’est la couturière de ma sœur.

— Mon tailleur, à moi, c’est Burgess et compagnie, dit Toots. Il est à la mode, mais très-cher. »

Paul, avec son petit bon sens, remua la tête comme pour dire que c’était facile à voir, et de fait il le pensait.

« Votre père est puissamment riche, n’est-ce pas ? demanda M. Toots.

— Oui, monsieur, répondit Paul. Il est Dombey et fils.

— Dombey et quoi ? demanda Toots.

— Et fils, monsieur, » répliqua Paul.

M. Toots répéta deux ou trois fois tout bas le nom de la maison, afin de se le graver dans l’esprit ; mais n’ayant pu y parvenir, il dit à Paul qu’il le prierait de le lui redire encore le lendemain matin, car c’était un nom à retenir. Le fait est qu’il ne se proposait rien moins que de s’écrire sur-le-champ une lettre particulière et confidentielle, supposée venir de Dombey et fils.

Pendant ce temps, les autres élèves se rassemblèrent autour de Paul, mais toujours à l’exception du pauvre garçon passé à l’état de statue. Ils avaient de bonnes manières, mais de tristes mines ; ils parlaient bas et étaient si exténués que Bitherstone, en comparaison de toute cette société, était un Roger-Bontemps ou un vrai recueil vivant de facéties. Et